Bertrand Blier au-delà des apparences

PATRIMOINE


Chez Bertrand Blier, comme avant chez Mocky, on reconnaît vite, à un extrait de dialogues, que l’on est dans son univers si particulier. Cinéaste anar, Blier n’est pas un artiste banal. La preuve avec Notre histoire…

Avec Blier, le scénario d’un film se réduit souvent  à une simple phrase. La preuve avec celui de Notre histoire. Abordé dans un train par une jeune femme en quête d’une aventure, un garagiste alcoolique s’installe dans la vie de celle-ci contre son gré.

Chez ce Bertrand Blier, l’importance est ailleurs et qu’importe si le scénario manque de logique ou est déstructuré. Chez lui, c’est l’incongru des séquences qui touchent, ces dialogues, parfois crus, qui vous cueillent comme un uppercut et sa direction d’acteurs auxquels il demande parfois l’impossible.

Si Depardieu colle parfaitement à l’univers d’un Blier avec lequel il a tourné depuis ses débuts, cette fois le cinéaste faisait un pari des plus culottés : demander à sa majesté Alain Delon de jouer ce mec revenu de tout. Sans doute, le fait que le cinéaste soit le fils d’un acteur de l’époque mythique du cinéma français n’est-il pas étranger à l’accord d’un comédien hanté par le passé.


Et il faut bien le dire : Delon joue le jeu à merveille et signe une des compositions les plus déroutantes de sa carrière avec ce personnage cabossé de partout. On est à cent coudées d’un autre de ses personnages-phare : celui du tueur guindé imaginé par Melville dans Le Samouraï. À une question que je lui posais un jour sur le fait qu’il ne tourne pas plus souvent ce type de personnage, Delon m’avait répondu d’un glacial : « Mais, vous savez, il faut trouver des cinéastes comme Blier. »

Ce personnage de garagiste offrit au comédien le premier et unique César de sa carrière… Il fera une brève apparition dans un autre film du cinéaste iconoclaste: Les Acteurs. Une réflexion mélancolique et poétique sur la vie d’artiste.

Notre histoire offre de grands moments surréalistes, ainsi quand le mari, campé par Galabru, se lamente au pied du lit où son épouse (Nathalie Baye) vient de passer un moment avec ce garagiste perdu.. C’est « l’histoire d’un mec » et c’est une histoire vraiment pas banale !

 

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