L’AMOUR ET LA PEINTURE

ALBERTO GIACOMETTI / THE FINAL PORTRAIT, de Stanley Tucci – 1h30

Avec Geoffrey Rush, Armie Hammer, Sylvie Testud, Clémence Poésy

Sortie : mercredi 6 juin 2018

Mon avis : 4 sur 5

Le pitch ?

Paris, 1964, Alberto Giacometti, un des plus grands maîtres de l’art du XXème siècle, invite son ami, l’écrivain américain James Lord , à poser pour un portrait.Flatté et intrigué, James accepte.
Cela ne devait prendre que quelques jours mais c’était sans compter sur le perfectionnisme et l’exigence du processus artistique de Giacometti …

Ce qui touche dans le film ?

Fin acteur mais aussi réalisateur, Stanley Tucci s’attaque ici à un genre difficile : faire revivre sur grand écran les affres d’un créateur. Et quel créateur ? Alberto  Giacometti, un artiste inspiré, sourcilleux sur son art, perfectionniste jusqu’à la folie, aussi grand fumeur que buveur invétéré. Il réussit son pari en échappant au biopic et en focalisant sur un épisode de la vie de l’artiste pour mieux nous faire comprendre sa psychologie torturée. Il souligne : « En se focalisant uniquement sur cette courte période, nous espérions en apprendre beaucoup, voire plus, sur cet artiste et sur sa vie. J’ai sélectionné plusieurs évènements vécus par Giacometti et les ai intégré dans ces deux semaines pour créer une sorte de condensé de sa vie et pour comprendre qui il était à l’intérieur et à l’extérieur de son studio. »

En montrant les passions amoureuses de cet ogre qui entretient une liaison passionnée avec une jeune prostituée délurée (Clémence Poésy est éclatante) alors que son épouse Annette, campée par Sylvie Testud impeccable) veille au quotidien, Stanley Tucci parvient à nous décrire l’artiste au quotidien.  Confidences de Sylvie Testud : « Annette était comme au fond d’un gouffre, elle a tout quitté pour Giacometti, pour son Art, et n’a jamais rien reçu de lui en retour. Elle n’a pourtant jamais cessé de garder espoir. » Face à son amour, Alberto  Giacometti préfère brûler sa vie, dépensant sans compter l’argent qui arrive régulièrement dans son atelier en désordre.Stanley Tucci(ci-dessous) parvient aussi à nous faire partager les déchirements intérieurs d’un peintre et sculpteur perfectionniste en diable qui fait poser des heures le journaliste et écrivain américain pour, sans cesse,

recommencer son œuvre. Pour nous faire ressentir les tensions amicales entre l’artiste et son modèle, il fallait trouver le casting idéal. Avec son physique de jeune premier, et sa manière très classieuse d’être, Armie Hammer est parfait pour le rôle de Lord.

Quant à Geoffrey Rush, il est absolument magistral dans le rôle de Giacometti qu’il habite de toute son énergie. Même s’il est beaucoup plus fin que Giacometti, petit, trapu et musclé, l’acteur nous bluffe dans une composition où il fait passer toute la démesure de cet artiste torturé et égoïste, qui partage avec son frère cette vie de bohème. Un frère, Diego, joué par Tony Shalhoub qui insuffle un ton humoristique original à certaines séquences. De Giacometti, Geoffrey Rush souligne à juste titre : « Il reconnaissait qu’il avait parfois des coups de folies mais que c’est ce qui lui permettait d’exister. »

Il faut aussi évoquer dans la réussite de ce film le fin travail du directeur de la photographie, Danny Cohen, qui restitue parfaitement le climat de l’époque et l’atmosphère de cet atelier peuplé d’énigmatique sculpture. Un opus fort sur un artiste et son art.

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