CANDELARIA, de Jhonny Hendrix Hinestroza – 1h27
Avec Alden Knight, Veronica Lynnel, Manuel Viveros
Sortie : mercredi 4 avril 2018
Mon avis : 4 sur 5
La Havane, 1995. Au plus fort de l’embargo américain, les Cubains traversent une crise économique sans précédent. Parmi eux, Candelaria et Victor Hugo, 150 ans à eux deux, vivent de bric et de broc jusqu’au jour où Candelaria rentre à la maison avec une petite trouvaille qui pourrait bien raviver la passion de leur jeunesse…
Ce qui touche dans le film ?
Pour Jhonny Hendrix Hinestroza, l’idée du film est née d’une aventure toute personnelle comme il le raconte : « Au cours des années 90, la Colombie traversait une période de turbulences marquée par l’instabilité politique et le traffic de drogue. Avec la femme que j’aimais, on voulait s’installer alors à Cuba et appeler notre futur enfant Candelaria. Mais malheureusement, cela n’est jamais arrivé, l’enfant n’a pas vu le jour, et je suis resté en Colombie. Il y a quelques années, dans le centre-ville de La Havane, je suis tombé par hasard sur une vieille dame qui s’appelait… Candelaria ! Cette femme aux yeux sombres et à la peau brulée m’a raconté son histoire avec sa voix roque et son ton mélodieux, une histoire très personnelle sur la période spéciale de Cuba après la chute de l’Union soviétique. Cette histoire est marquée par un ensemble de coïncidences et est personnellement liée à l’histoire de ma propre jeunesse. »
En prenant les années 90 et la période dite « spéciale », marquée par une pénurie généralisée dans l’île suite à l’éclatement de l’empire soviétique et de l’embargo américain maintenu avec une rigidité extrême, le cinéaste décrit parfaitement comment Cuba continue de vivre sur un rêve ancien, même si la population souffre au quotidien.
En filmant le quotidien de ce vieux couple, il montre bien comment les seniors sans enfants pour les aider sont contraints de survivre de petites combines en petites combines et sont prêts à tout – y compris à tourner des films pornos – pour tenter de récupérer quelques pauvres dollars. Et, au fur et à mesure, on mesure comment la situation de ces seniors symbolisent la situation de bien des « vieux » en Amérique latine.
« On parle toujours de Cuba, du socialisme et de sa pauvreté ; on parle depuis peu de la crise au Venezuela, mais il suffit de regarder dans sa rue pour constater que, même si nous refusons de l’accepter, beaucoup de gens vivent dans des conditions aussi misérables en Colombie et que nos anciens meurent parfois dans une pauvreté absolue. Et même si dans ce lm c’est l’accent et la musique romantique cubaines que nous entendons, ou les danseurs de boléro que nous voyons, les problématiques abordées sont tout autant colombiennes et plus largement latino-américaines« , souligne Jhonny Hendrix Hinestroza.
Portée par le duo de deux comédiens magnifiques – les sourires d’Alden Knhight et Veronica Lynnel restent longtemps en mémoire une fois le générique passé – le cinéaste parvient à nous faire partager cette histoire d’amour plus forte que la misère, plus forte que la mort. Et dans le décor nostalgique de la vieille Havane, ce récit évoque des sentiments éternels avec pudeur et subtilité. Magnifique !

