Filmant au plus près des acteurs, Costa Gavras nous fait partager ces tranches de fin de vie, avec des patients aussi différents que la jeune fille campée par Agathe Bonitzer qui refuse avec l’énergie du désespoir de rentrer dans le servie des soins palliatifs, ou cette Madame Broquet (subtile Hiam Abbass) qui accepte, non sans révolte, de « laisser partir » son mari.
Avec, en fil directeur la maxime de La Bruyère, citée par le philosophe – « Ni le soleil ni la mort ne peuvent se regarder fixement » – l’histoire montre bien et sans aucun pathos, malgré des séquences très émouvantes, la réalité des soins palliatifs et l’engagement d’un corps médical qui s’est formé pour tenir ce rôle de passeur. Quant à Bruno Podalydès – qui apporte un regard non dénué d’inquiétude de l’intellectuel confronté au mystère de la finitude – et Kad Merad, dont le regard est plein d’humanité, ils forment un duo juste de bout en bout. Avec, en témoin de leurs échanges, Marilyne Canto qui incarne avec grâce et subtilité l’épouse de l’écrivain.
Si l’on peut noter un certain optimisme du film, car les services de soins palliatifs ne sont pas autant développés que ce qu’il faudrait en France, Costa Gavras a le mérite, dans une mise en scène solaire – il fait presque un temps méditerranéen sur Paris – d’insuffler de la vie dans son récit, avec des séquences étonnantes comme celle du club de Harley ou celle où, accompagnée par le très beau poème-chanson de Prévert et Kosma – Deux escargots s’en vont à l’enterrement– la mère gitane est reconduite à sa caravane qui sera son ultime demeure, entourée de son clan, de musiciens…
Signant un film nécessaire et politique (à son habitude) au noble sens du terme, Costa Gavras remet l’humain au cœur de la mort, sans se cacher derrière certains dogmatismes et morales figés. La peur des politiciens sur le dossier qui reste encore enterré aujourd’hui empêche le débat d’avoir lieu, mais un tel film a le pouvoir de ressusciter cet indispensable dialogue quand, comme dit le cinéaste, « La responsabilité du pouvoir, face à la fin de vie, est colossale. » Il est temps de prendre en compte la vie de la mort…
