Le coffret qui lui est dédié témoigne du tempérament de l’actrice qui tourna aussi avec Luis Buñuel et Marguerite Duras et qui utilisa aussi le cinéma comme moyen de sensibilisation à des problèmes sociétaux importants. Ainsi, elle peut incarner une extravagante vamp dans Les Lèvres rouges et une artiste rendue folle dans Aloïse sans oublier la femme libre et sensuelle dans Le jardin qui bascule, trois films réunis ici. On y retrouve aussi son remarquable documentaire Sois belle et tais-toi ! (1981), dans laquelle elle menait une vingtaine d’entretiens, enregistrés entre 1975 et 1976, avec des actrices pour évoquer leur vie professionnelle. On se souvient comment Jane Fonda évoquait le diktat de l’apparence imposé aux jeunes actrices aux États-Unis.
Quitte à le payer par les réactions de certaines figures du cinéma – Montand par exemple ne voulut pas tourner avec elle et Daniel Toscan du Plantier fit tout pour bloquer sa carrière- Delphine Seyrig refusa jusqu’au bout les compromissions et les films alimentaires. Et se battit pour préserver son intimité quitte à froisser certains journalistes comme le souligne Mireille Brangé , évoquant son parcours dans les années 70 : « On prend le masque pour le visage. Sa virulence contre les journalistes a pu la donner pour hautaine, alors qu’elle est réservée et va plus volontiers vers les inconnus chez qui elle devine la même timidité plutôt que vers ceux qu’elle admire. On la croit sophistiquée et ses goûts élitistes : on découvre en l’approchant qu’elle aime le rock, la musique pop, est intarissable sur les protest singers autant que sur les chansons populaires des années 30 qu’elle connaît par cœur. »
À travers ces films et cette biographie, on mesure combien, trois décennies après sa disparition prématurée – en 1990 à 58 ans- Delphine Seyrig a marqué le cinéma et le théâtre. Elle – qui a cru, jusqu’à sa dernière interview en juillet 1990, que des révolutions étaient encore possibles : « Je pense que quelque chose va resurgir. (…) Finalement, quand on vit assez longtemps, on voit les choses se faire, se défaire et se refaire. Comme la marée qui monte, descend et remonte. Éternellement. »
(*)Arte Éditions (**) Nouveau monde éditions
