Delphine Seyrig ou l’indépendance

Double actualité pour célébrer le talent de Delphine Seyrig, icône du cinéma mais aussi avant-gardiste et féministe militante, qui a marqué de sa voix les écrans noirs de nos nuits blanches. Outre un coffret (*) de six films restaurés, on peut retrouver en version de poche la remarquable biographie, Delphine Seyrig – Une vie (**) signée Mireille Brangé.

Personnalité complexe, née à Beyrouth, en 1932, dans une famille singulière – son père Henry était directeur du service des Antiquités du Liban et sa mère, Hermine de Saussure était navigatrice et aventurière – Dephine Seyrig a mis longtemps à percer comme le rappelle Mireille Brangé dans la biographie fouillée qu’elle lui a consacrée.

Elle décrit par le menu comment, exilée aux États-Unis avec son mari, peintre, Jack Youngerman, elle va connaître des années de vache maigre et de doutes. Il lui faudra faire montre d’une vraie constance et beaucoup de travail pour parvenir à l’orée des années 60 à être enfin reconnue pour son talent. Et ne pas être réduite à un si singulier timbre de voix. Car, bien avant d’être célèbre et adulée, l’actrice n’a jamais cultivé n’entre-deux. Mireille Brangé note évoquant la fin du tournage de L’Année dernière à Marienbad, d’Alain Resnais, le film qui va la révéler et dont elle n’a pu visionner les rushes : « Le film terminé sera-t-il réussi ou raté ? Admirable ou parfaitement ridicule ? Sifflé ou porté aux nues ? Elle ne peut pas le dire. Mais, certainement pas médiocre, elle en est sûre. Et cela tombe bien : elle n’aime ni le cinéma ni les théâtres tièdes. Ni la vie vécu à moitié. »

Tournant aussi bien en français qu’en anglais et en allemand dans des productions exigeantes, Delphine Seyrig n’a jamais céder à son désir de liberté et fut une pionnières du féminisme. Sa prestation en octobre 1972 comme invitée surprise d’un débat animé par Jean-Pierre Elkabbach dans Actuel 2 et consacré à l’avortement témoigne de son courage quand elle lance : « Notre liberté, nous la prenons tous les jours, au risque de notre vie. »

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