Sacha Guitry s’est bien rattrapé ensuite dans le cinéma « qui parle » comme l’attestent les onze films choisis pour le célébrer lors de cette reprise. Si dix-sept de ses films sont des adaptations de pièces, Guitry le fit avec la manière et cette façon de se poser en moraliste qui pointe sa caméra sur les travers de la nature humaine, les relations homme-femme, son ironie devenant cynisme à la fin de sa vie. Et puis, il sut faire œuvre originale quand il s’éloigna des planches.
En effet, Guitry eut aussi des trouvailles et fit école. Ainsi, il eut l’idée des génériques parlés, espèce de films dans le films, qui, marquant la prépondérance de la parole, ont inspiré des cinéastes comme Orson Welles. Dans Le Roman d’un tricheur, il construit presque le film comme un opus muet et la voix entendue en off est la sienne, remplaçant celle de tous les acteurs comme s’il tirait les ficelles de marionnettes d’un théâtre sans paroles.
Après la guerre où Guitry sera inquiété et incarcéré deux mois pour avoir peu ouvert les yeux durant l’Occupation – il écrira sur le sujet – il signe des films marqués par cette période sombre avec des opus comme Le Diable boiteux, sur la vie de Talleyrand, ce diplomate qui trahit tout le monde pour n’être qu’au service de la France. Et dans La Poison – petit chef d’œuvre sur l’acquittement d’un féminicide – il dresse un portrait ironique des institutions et notamment de la justice. Un film porté par l’interprétation de Michel Simon, qu’il dirigea à trois reprises, et qui, à sa mort, a déclaré dans une formule lapidaire et très parlante : « Il me consolait d’être au monde. »
Dans un texte d’analyse, François Truffaut soulignait : » Les dialogues de films, les scènes d’amour, les rapports sentimentaux dans la plupart des films sont d’une fausseté incroyable. Dans ceux de Sacha Guitry, la vérité surgit brusquement à la fin de chaque scène avec une telle force que l’on sursaute presque. » Ces reprises permettent d’apprécier ce ton inégalée et le riche univers cinématographique de Sacha Guitry.
En guise de conclusion du moraliste
