Pour incarner cette femme qui est au centre de tout le film, il fallait une actrice d’envergure. Avec Afef Ben Mahmoud, il a fait le bon choix, tant cette actrice, réalisatrice et productrice, a mis toute son énergie pour défendre ce personnage, victime du destin. Medhi Hmili raconte : « Pour Afef qui est très féministe, voir son personnage souffrir était compliqué. Nous avons décidé de ne répéter aucune scène du film, y compris quand elle donne la réplique aux autres comédiens. Nous étions très conscients du risque que nous prenions. Nous voulions faire le film au jour le jour. » Le constat est sans appel et montre comment, derrière une apparente modernité, la Tunisie reste un pays patriarcal comme le rappelle le cinéaste : « Une femme accusée d’adultère et de prostitution encourt jusqu’à 5 ans de prison. Si le mari ne poursuit pas sa femme en justice, elle prend 6 mois.«
Loin des images d’Épinal d’un pays en forme de piège à touristes, Amel & les Fauves fait découvrir l’envers du décor en apparence idyllique. La Tunisie est un pays où règne une corruption folle et où la loi du plus fort règne. On le mesure avec la descente aux enfers de son fils dans les nuits underground de Tunis, où la violence est permanente. Un monde qu’a connu le réalisateur et sa mère quand elle est sortie de prison. Il ajoute : « Ce monde absorbe et protège tous ces gens-là. Amel évolue dans un cabaret quand Moumen fréquente un milieu plus berlinois, baigné de musique techno et de drogues dures. »
Puissante charge contre la société tunisienne, porté par un casting des plus solides, Amel & les Fauves pâtit un peu, sur la longueur, d’un effet de surenchère dans les scènes glauques. Ce qui, à la longue, finit par atténuer la force de ce pamphlet politique et social fort qui en dit pourtant long sur la déliquescence d’une société.
