Roman
Bertrand Blier n’aime rien faire comme les autres. À 82 ans, il le prouve en racontant son enfance à travers un roman. Fragile des bronches (*) est une espèce d’escapade dans les souvenirs à la manière poétique d’un Prévert.


Loin des plateaux de cinéma depuis Convoi exceptionnel, en 2019, Bertrand Blier ne renie pas son amour des dialogues et des histoires savoureuses. Dans ce roman autobiographie écrit avec Eva Bester, Fragile des bronches(*), il donne le ton dès la première phrase, on pourrait dire réplique – « Ma mère, un jour, a voulu se balancer par la fenêtre »- et signifie qu’il évolue dans le registre du privé. Si les noms ont été changés, ce récit, pudique émouvant et ironique, retrace son adolescence dans le 16e arrondissement de Paris, entre un père, comédien et fieffé séducteur, et une mère dépressive qui joue du Chopin dans l’appartement familial et relit sans arrêt La Renarde, de Mary Webb. Comme le fils,un ado de 15 ans est fragile des bronches, il est expédié à la montagne pour se refaire une santé. Sa mère l’accompagne et va tomber un peu amoureuse d’une espèce de séducteur qui fait commerce dans l’électroménager, porte de Champerret.
Avec un sens consommé des situations et des dialogues, Bertrand Blier sait, en quelques lignes et quelques chapitres, planter le décor, donner vie à des personnages, laisse voir les états d’âme à fleur de peau et à fleur de mots. Ainsi quand il décrit le couple en crise : « La dernière image de ma mère que j’emporte avec moi dans ma fuite, c’est celle d’une femme éplorée, coupée de ses bases, à savoir : une éducation bourgeoise, petite famille, petite bourgeoise, province; et moi, perdu aussi. Je comprends que tout ce qui me viendra de bon dans la vie sera apporté par ma mère, mais aussi peut-être par mon père, dont je vois les gros yeux effarés porter difficilement ses valises de tendresse. »
