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QU’UN SANG IMPUR…, d’Abdel Raouf Dafri – 1h49 – 2019
Avec Johan Heldenbergh, Linh-Dan Pham, Lyna Khoudri, Olivier Gourmet
Diffusion : Canal+ : mercredi 7 avril à 21.00
Le scénario de ce film est en forme d’upercut. Le pitch ? Alors qu’il n’est plus que l’ombre du guerrier qu’il était en Indochine, le colonel Paul Andreas Breitner se voit contraint de traverser une Algérie en guerre, à la recherche de son ancien officier supérieur : le colonel Simon Delignières, porté disparu dans les Aurès Nemencha, une véritable poudrière aux mains des rebelles.
En tournant ce récit souvent violent, Abdel Raouf Dafri a voulu montrer cette guerre d’indépendance sans faux semblant. Décrire les sentiments humains par le truchement de séquences spectaculaires et parfois difficilement soutenables. Le réalisateur expliquait à la sortie du film comment il avait nourri son scénario de nombreuses lectures : « Les témoignages écrits par des appelés, des militaires et aussi des tortionnaires comme Aussaresses, Massu, ainsi que les ouvrages d’historiens illustres tels que Pierre Vidal-Nacquet, Benjamin Stora ou Germaine Tillon. Mais c’est surtout le point de vue des officiers qui avaient fait la guerre qui m’intéressait. J’ai parcouru les écrits d’Alexis de Tocqueville, une ordure absolue qui, dès 1841, justifie les pires horreurs faites par la France en Algérie. »
L’homme sait écrire des séquences qui font mouche comme il l’a prouvé dans les scénarios des deux Mesrine ou de la série Braquo. Et, avec des comédiens de la trempe d’un Johan Heldenbergh et Olivier Gourmet, il pouvait compter sur des acteurs capables de signer des compositions fortes.
Pour autant, le résultat final est loin d’être aussi fort que sur le papier. Tout au long du récit, on ne peut s’empêcher, avec cette quête d’un officier disparu, de penser à Apocalypse Now, et au roman original de Conrad qui l’a inspiré (de loin) : Au cœur des ténèbres. S’il montre bien que, dans les deux camps, les méthodes sont à dénoncer, s’il décrit bien comment cette sale guerre a conduit aux pires extrémités, il ne parvient pas à échapper à certaines caricatures, contrairement à certaines de ses déclarations. On surprend même Olivier Gourmet à surjouer, comme s’il voulait « sauver » son personnage, car il n’a sans doute pas assez dirigé. Quant à Johan Heldenbergh, malgré le talent qui est le sien, il devient petit à petit la caricature de l’ancien soldat d’Indochine perdu dans ce nouveau conflit colonial.
In fine, on se retrouve plus dans l’univers d’un western que dans celui d’une guerre comme celle d’Algérie. Si Qu’un sang impur… a le mérite de rappeler que la guerre propre n’est qu’une connerie médiatique de plus, le cinéaste laisse le spectateur sur le côté de la route…

