CÉSAR 2021 : UN DOC QUI A FAIT PARLER DE LUI

Qu’il soit primé (ou non) lors de la cérémonie des César 2021 ce vendredi, Adolescentes, de Sébastien Lifshitz a marqué les écrans de cette année pas comme les autres. En prime, ce documentaire  a – et le fait est rare – remporté le dernier prix Jean Vigo.

Sébastien Lifshitz s’inscrit dans la lignée d’un Frédérick Wiseman avec des documentaires qui prennent le temps et laissent parler les images. En 2h15, Adolescentes donnent à voir le parcours de deux jeunes filles dans la région de Brive-la-Gaillarde. Le pitch ? Emma et Anaïs sont inséparables et pourtant, tout les oppose. Adolescentes suit leur parcours depuis leur 13 ans jusqu’à leur majorité, cinq ans de vie où se bousculent les transformations et les premières fois. A leur 18 ans, on se demande alors quelles femmes sont-elles devenues et où en est leur amitié.

Ce film montre bien la force de ce documentaire (sorti en mars dernier) quand il est mené de main de maître. Car, à travers le parcours de ces deux jeunes filles, Sébastien Lifshitz dresse en creux le portrait de la France contemporaine. Qui plus est d’une France dite « profonde » : Brive, sous-préfecture de la Corrèze de 50 000 habitants, est, comme le souligne le cinéaste une ville de province « un peu neutre et dormante »

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De fait, à travers les personnalités fortes et contrastées de Emma, issue d’un milieu aisé,  et Anaïs, venue d’une famille plus humble, on mesure des interrogations communes : la remise en question de l’autorité parentale, les rêves d’avenir, les questions sur le sexe, les problèmes d’éducation… On voit par exemple comment, lors de l’élection de Emmanuel Macron, la famille d’Anaïs aurait rêvé voir une Marine Le Pen arriver à l’Élysée, symbole de la crise profonde traversée par une classe sociale qui se cherche et cherche de nouveaux messies.

Fruit de  500 heures de rushes avec  1100 séquences, ce tournage qui a duré cinq ans a nécessité un montage méticuleux du  cinéaste et de Tina Baz pour proposer un documentaire très riche « Il a fallu bien sûr faire le sacrifice de beaucoup de scènes que nous aimions. Le contrat avec Arte Cinéma stipulait une durée maximale de 2h. Cette pression nous a poussé à aller à l’essentiel, chercher l’épure. […] A force de choix, nous sommes parvenus je crois à un concentré, un parfum, qui restitue l’essence de leur vie adolescente », explique Sébastien Lifshitz.

Preuve de l’impact de Adolescentes : outre trois autres nominations (photographie, montage et son), il va concourir pour le César du meilleur documentaire et celui du meilleur réalisateur ! Dans quelques heures, la messe sera dite…


Du côté du court métrage

Le César du meilleur court métrage peut booster une carrière. En flirtant avec le fantastique, Sofia Alaoui a signé un film prenant qui concourt dans cette catégorie : Qu’importe si les bêtes meurent.

Le pitch du court-métrage de Sofia Alaoui ? Dans les hautes montagnes de l’Atlas, Abdellah, un jeune berger et son père, sont bloqués par la neige dans leur bergerie. Leurs bêtes dépérissant, Abdellah doit s’approvisionner en nourriture dans un village commerçant à plus d’un jour de marche. Avec son mulet, il arrive au village et découvre que celui-ci est désert à cause d’un curieux événement qui a bouleversé tous les croyants…

Qu’importe si les bêtes meurent –

Déjà remarqué par le Grand Prix du Jury du Festival Sundance 2020, Qu’importe si les bêtes meurent est un opus original qui sème le trouble chez le spectateur qui, au fil du récit,  a bien du mal à distinguer la frontière entre le réel et le fantastique. Tournant son court-métrage à Imilchil dans le Haut-Atlas et en mettant en avant le beauté naturelle de cette région, en misant sur des scènes éclairées naturellement ou à la bougie, Sofia Alaoui signe ici une parabole sur l’humaine condition qui ne manque pas de profondeur.

 

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