RÉMI JULIENNE : SA DERNIÈRE SORTIE DE PISTE

Hommage

Il avait pris tous les risques mais calculés dans des cascades motorisés. Emporté par la COVID-19, Rémi Julienne a marqué les films d’action de sa griffe.

En 1400 productions, ayant aussi bien dirigé les cascades motorisées de Jean-Paul Belmondo que les séquences d’action de six James Bond,  Rémi Julienne, 90 ans, vient de sortir de piste, sans cascades ni effets spéciaux.  Comme Claude Carliez,  avec lequel ils ont partagé bien des plateaux, il fut un des acteurs majeurs de la professionnalisation du métier de cascadeur.

Dans son dernier livre se souvenirs, Ma vie en cascades (*), Rémi Julienne évoquait  ainsi le désordre régnant sur A tout casser avec Eddie Constantine et Johnny Hallyday. Nous sommes en 1968 et le tournage tourne à la « pagaille noire » avec même Johnny qui se « prend une gamelle en faisait une roue arrière. » Et donc Rémi Julienne doit remettre un peu d’ordre et interdire qu’on utilise les machines préparées pour s’amuser. Il écrit : « On croit toujours que le cascadeur sait tout faire avec n’importe quoi. C’est faux. Il doit maîtriser les contraintes ; donc disposer d’un matériel qui lui correspond en tout. Le moindre dérèglement peut être fatal. »

Cascadeur affuté, il a mis en pratique les enseignements d’un Gil Delamare avec lequel il fit ses armes et qui se tua en 1966 sur le tournage de Le Saint prend l’affût, où il doublait Jean Marais. Avec cet ancien champion de France de moto-cross (en 1958), la cascade consistait à prévoir le moindre pépin pour éviter l’accident mortel. Pour autant, il savait ménager des séquences des plus spectaculaires : c’est lui qui doublait le religieuse en 2CV dans la série des Gendarmes de Saint-Tropez. C’est lui qui, sur le tournage du Casse, de Henri Verneuil, en 1971, organisa une course-poursuite de neuf minutes dans un quartier d’Athènes sans que l’équipe de tournage n’interrompe la circulation. C’est encore lui qui, en soldat allemand au guidon d’un side-car, reçoit des citrouilles sur la tête, lancées par un Bourvil déchaîné dans La Grande Vadrouille.

L’homme de l’ombre, Rémy Julienne n’a jamais boudé la lumière et a tôt compris l’intérêt de garder des archives de ses exploits cinématographiques. Il est vrai une séquence comme celle de la poursuite en camion dans Permis de tuer – où un semi-remorque américain doit rouler en équilibre sur le côté – n’est pas signée d’un débutant et méritait d’être immortalisée. Et dans l’acrobatique marche arrière du Da Vinci Code, en 2006, une de ses dernières performances, il avait fait monter le volant à l’arrière de la voiture !

Si aujourd’hui, le cascadeur a tiré sa révérence, il peut compter sur son fils Michel et son petit-fils pour continuer de faire scintiller son nom au générique des films. « Le grand cascadeur », comme le surnommait Jean-Paul Belmondo, a su transmettre son savoir et sa passion.

(*) Ed.  1

 

 

Deux familles de cascadeurs réunis pour la soirée des Trophées
des cascadeurs du cinéma en 2013 : les Julienne et les Carliez.

Laisser un commentaire