LE MONDE SELON FRANCO

PATRIMOINE


LETTRE À FRANCO, de Alejandro Amenábar – 1H47

Avec Karra Elejalde, Eduard Fernández, Santi Prego

Sortie : février 2020

Décrire la prise du pouvoir de Franco à travers le parcours du grand écrivain Miguel de Unamuno : c’était le pari risqué de Alejandro Amenábar. Le pitch ? L’action se passe en Espagne durant l’été 1936. Le célèbre écrivain Miguel de Unamuno décide de soutenir publiquement la rébellion militaire avec la conviction qu’elle va rétablir l’ordre. Pendant ce temps, fort de ses succès militaires, le général Francisco Franco prend les rênes de l’insurrection. Alors que les incarcérations d’opposants se multiplient, Miguel de Unamuno se rend compte que l’ascension de Franco au pouvoir est devenue inéluctable.

L’astuce de Alejandro Amenábar, c’est de montrer la prise du pouvoir du dictateur Franco à travers le prisme de ce grand écrivain catholique que fut Miguel de Unamuno et qui se range du côté de la rébellion par « haine « des rouges.

Le réalisateur a d’ailleurs contacté les descendants du cinéaste et il raconte : « Ils ont lu le scénario et se sont montrés respectueux, malgré la controverse générée. Il y a des points sur lesquels tout le monde ne s’accordent pas : notamment l’épisode du don de 5 000 pesetas à l’insurrection. Pour ces questions les plus sensibles liées à la guerre, mon but était de rechercher autant d’informations que possible avant de prendre la décision finale pour le scénario. Je crois sincèrement que le film est un portrait fidèle de ce qu’Unamuno a dû ressentir pendant ces mois, coincé à Salamanque, dans sa maison, rejeté par de vieux amis et adoré par de futurs ennemis. »

Le cinéaste montre bien comment le grand romancier met du temps pour découvrir la réalité de la prise du pouvoir de Franco, avec son lot d’exécutions sommaires, de tortures… et  le soutien actif des envoyés de Hitler. Et il montre bien aussi comment ce Franco qui est en fait un petit militaire lambda – de l’avis même des autres gradés se soulevant contre la République – se révèle un redoutable tacticien pour prendre le pouvoir. In fine, mais il est trop tard, Unamuno se rend compte comment le régime l’a utilisé, notamment quand il découvre comment ses deux amis les plus proches ont été exécutés, malgré les mots rassurants du caudillo.

Après son célèbre discours en présence de Franco et où il s’attaque directement au général Millán-Astray (fondateur de la tristement célèbre légion étrangère espagnole, ci-dessus), le romancier sera assez vite victime d’un infarctus  qui lui sera fatal.

Outre une réalisation sans failles, cette Lettre à Franco repose aussi sur un casting impeccable qui fait revivre de manière subtile les heures si sombres pour la République espagnole.

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