DISPARITION
PORTIER DE NUIT, de Liliana Cavani – 1h58
avec Dick Bogarde, Charlotte Rampling
Sortie : avril 1974
Quand Liliana Cavani sort ce film, il crée un scandale, tant le scénario est sulfureux. Maximilian est portier de nuit dans un hôtel hébergeant des anciens nazis. Lucia accompagnant son mari, chef d’orchestre, loge dans cet hôtel. Maximilian reconnaît en elle une ancienne déportée qui était sa maîtresse. Lucia se trouve attirée par son ancien bourreau et redevient la maîtresse de Maximilian. Mais ils sont traqués par d’anciens nazis qui tentent de faire oublier leur passé.
Œuvre résolument ambigüe, Portier de nuit l’est d’autant plus que le film ne montre qu’une vision fantasmée et pas du tout réaliste des camps d’extermination nazie. Avec, au cœur des flashbacks, une séquence symbolique où Maximilian filme les déportés, en tournant, tel un rapace avec sa caméra, autour d’eux. Comme si le spectateur était aussi une espèce de voyeur dans cette affaire.
De manière très perverse, Liliana Cavani décrit ici une forme du syndrome de Stockholm mais, poussé à l’extrême au travers de scènes sado-masochistes qui ne peuvent laisser insensible. Il est vrai, l’histoire est bouleversante et ce d’autant plus que le duo formé par Dirk Bogarde et Charlotte Rampling joue d’une manière intense cette relation trouble. Avec, au point culminant du récit, la séquence
passée dans les annales où, à demi nue, Charlotte Rampling imite dans une espèce de salon fréquentée par les officiers nazis, Marlene Dietrich. Charlotte Rampling avait été finalement choisi, car repérée dans Les Damnés de Visconti après que Romy Schneider a refusé de jouer Lucia, tout comme Mia Farrow et Dominique Sanda. Ce fut d’ailleurs la première séquence tournée du film.
La film fit scandale à sa sortie et, aux États-Unis, certains le taxèrent de pornographique. En Italie, il a été censuré en raison des scènes de sexe jugées vulgaires et obscènes, mais aussi parce qu’il avait été réalisé par une femme. Ce qui provoqua les protestations de plusieurs cinéastes – dont Pier Paolo Pasolini, Luchino Visconti et Michelangelo Antonioni – contre la Commission de censure.
Aussi bien joué que réalisé, Portier de nuit continue, malgré les années écoulées, à susciter des réactions qui ne sont pas tièdes. Car, outre la relation plus que trouble entre le bourreau et sa victime, il montre bien comment d’anciens nazis ont réussi à se refaire une virginité en toute impunité.
