A DARK-DARK MAN, de Adikhan Yerzhanov – 1h50
avec Dania Alshinov, Dinara Baktybaeva, Teoman Khos
Sortie : mercredi 14 octobre 2020
Mon avis : 4 sur 5
Le pitch ?
Bekzat est un jeune policier qui connait déjà toutes les ficelles de la corruption des steppes kazakhes. Chargé d’étouffer une nouvelle affaire d’agressions mortelles sur des petits garçons, il est gêné par l’intervention d’une journaliste pugnace et déterminée. Les certitudes du cow-boy des steppes vacillent.
Et alors ?
Entre western – les paysages déserts des steppes kazakhes ont des airs de paysages de l’Ouest – et sombre polar, A dark-dark man joue sur les longs plans silencieux à la manière du western spaghetti. Adikhan Yerzhanov souligne aussi sa fascination pour le film noir à la française qu’il préfère aux modèles venus de Hollywood. Il souligne : « Une version française du genre, dans laquelle le pire peut arriver à la lumière d’un jour ordinaire, nous convenait parfaitement. »
Très lentement (peut-être trop parfois car le film aurait pu être un plus court sans outrages), A dark-dark man conduit à un final inévitablement violent dans un affrontement violent au milieu d’un couloir et qui contracte avec la majeure partie de l’histoire qui se déroule dans les grands espaces à l’horizon pur. Comme s’il fallait, symboliquement un huit-clos, pour terminer ce drame moderne.
Avec un humour parfois noir – Bekzat peut ainsi poser son bol de riz fumant à côté du cadavre abandonné d’un enfant – Adikhan Yerzhanov semble aimer jouer, de manière originale, avec plusieurs codes. Ainsi, l’image de la vieille voiture du flic, qu’il faut en permanence pousser pour la faire démarrer – on est loin des fringants destriers de l’Ouest – symbolise un univers moderne en pleine déliquescence. Et apporte une touche d’ironie dans cette description d’un monde coupé de tout et dans lequel le commissariat semble un havre de violence et de méthodes expéditives.

Face à ce monde viril et médiéval, la belle Dinara Baktybaeva, vêtue comme un flic des années 50 dans ce imperméable impeccable, est un peu le fil d’Ariane qui permet à Bekzat d’échapper à ce labyrinthe de corruption. Et, dans ce monde de fous, seuls les simples d’esprit semblent conserver une certain innocence, de ces personnages dont le rire est un moyen d’échapper au désespoir. Et le cinéaste de conclure : « Pour moi, l’humour sauve. Pendant le peste en Europe, les gens croyaient qu’un bonne humeur protégeait contre la maladie. » On a pu le mesurer parfois sur les réseaux sociaux durant la période inédite de confinement.

