LA COMÉDIE DE LA VIE NUMÉRIQUE

EFFACER L’HISTORIQUE, de Benoît Delépine et Gustave Kervern – 1h46

Avec Blanche Gardin, Denis Podalydès, Corinne Masiero

Sortie : mercredi 26 août 2020

Mon avis : 3 sur 5

Le pitch ?

Dans un lotissement en province, trois voisins sont en prise avec les nouvelles technologies et les réseaux sociaux.Il y a Marie, victime de chantage avec une sextape, Bertrand, dont la fille est harcelée au lycée, et Christine, chauffeur VTC dépitée de voir que les notes de ses clients refusent de décoller. Ensemble, ils décident de partir en guerre contre les géants d’internet. Une bataille foutue d’avance, quoique…

Et alors ?

Film post gilet jaunes et satire du monde numérique, le nouvel opus du duo déjanté du cinéma retrouve un thème récurrent de leur univers : celui des petites gens, notamment dans le nord de la France qui se débattent pour survivre dans un quotidien déprimant et dans ces lotissements sans âme. Évoquant le dodo, ce pigeon géant de l’île Maurice qui a disparu en raison des activités humaines, ils racontent : « Comme le dodo, l’homme croit être le roi du monde, n’avoir aucun prédateur le menaçant, mais il a créé l’intelligence artificielle qui est beaucoup plus puissante que lui, et aujourd’hui, on voit les prémices de ce qui va nous arriver. On pressent que ça va mal finir. »


Jouant sur trois comédiens affûtés avec, au centre du récit, le personnage obsédé par une voix téléphonique et campé avec une vraie gourmandise par Denis Podalydès, le film brocarde avec entrain tout ce qui structure notre société numérique : la solitude au bout du réseau, la quête des validations virtuelles pour Corinne Masiero, reconverti en conductrice de VTC. Elle a cette formule qui en dit long quand on lui demande dans le site de VTC qui l’emploie si elle veut plus de likes, d’amis : « Non, les amis ça va. »

Faisant rire de situations qui ne le sont pas – le personnage de Blanche Gardin est une addition de névroses et de solitude – Effacer l’historique ne tient pas toujours le rythme sur la durée mais ménage quelques séquences fortes : celle de Corinne Masiero qui hurle et pleure sur le rond-point où se joua la fraternité des gilets jaunes ou celle où Blanche Gardin renverse le café sur la feuille de commande de livreur de Alimazone, ce qui permet à Benoît Poelvoorde de faire une prestation émouvante et forte dans un tout petit second rôle.

Satire d’une société où le tout connecté renforce un peu plus les fractures sociales cette comédie est certes parfois inégale, mais elle a l’immense mérite de pointer sur doigt les dérives de ce monde à l’heure du règne de Big Brother.

 

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