Patrimoine
Film à redécouvrir, Le Port du désir, d’Edmond T-Greville est un polar qui explore les bas-fonds marseillais avec un face-à-face explosif entre Jean Gabin et Jean-Roger Caussimon, sournois en diable.
Sorti en 1955, Le Port du désir est un polar qui se déroule à Marseille, où le capitaine Lequévic et son coéquipier Michel sont chargés de renflouer un navire. Au cours de l’opération, ils découvrent sur l’épave le cadavre d’une femme, assassinée par Black, un contrebandier, propriétaire du bateau…
Dans Le Port du désir, il y a Gabin, le Gabin de la seconde période, massif, carré qui parle peu mais fort et promène sa dégaine de capitaine courage sur les docks et dans l’hôtel un peu maison close où il est logé le temps de la mission de renflouage. Gabin qui lâche ses formules laconiques en guise de philosophie de vie : « Plus on est malheureux, moins il faut le montrer. »
Il y a encore Jean-Roger Caussimon absolument étonnant – le grand auteur de chansons et compagnon d’écriture pour Léo Ferré fait parfois oublier qu’il fut aussi un grand comédien -dans la peau de cet armateur trafiquant et qui cache une violence à fleur de peau derrière un aspect bourgeois. On le mesure quand il se met, les yeux exorbités, à jouer de la mitraillette dans la séquence finale où sa folie meurtrière surgit.
Et puis, presque surtout, il y a le troisième personnage de cette sombre histoire : Marseille, son port, son dancing mal famé où l’on danse mais où l’on consomme aussi du pain de fesses, ses quais sur lesquels on peut se faire dessouder en plein soleil… son quartier du Panier où les aveugles jouent les intermédiaires pour les mecs de la pègre alors que résonne
une chanson célébrant les charmes de la Joliette. Marseille, quoi !
Même si ce polar donne lieu à une scène de bagarre un brin ridicule, le film tient son monde en haleine par cette alternance entre des scènes de séduction et des scènes d’action : celle où les tueurs jouent du pétard en se cachant derrière des wagons qui roulent doucement est surprenante.
Enfin, on y découvre de très belles séquences de prise de vue sous-marine quand le scaphandrier (Henri Vidal) descend explorer l’épave. Elles sont signées d’un certain Louis Malle. Un polar qui mérite vraiment un arrêt sur images.
