Nicholas Ray dans le souffle de l’histoire

Patrimoine

1964. Nicholas Ray tourne une grande fresque historique : Les 55 jours de Pékin. En  près de 2h30, avec un casting des plus flamboyants, il y retraçait le soulèvement des Boxers en 1900 à Pékin. Un tournage tourmenté.

Nous sommes en 1900 à Pékin où le soulèvement des Boxers menace la stabilité du pays et l’équilibre fragile entretenu entre les délégations étrangères et le pouvoir impérial chinois. Les délégations doivent donc réagir. Le major Matt Lewis (Charlton Heston) est envoyé dans la capitale chinoise à la tête d’un détachement pour protéger l’ambassade américaine. C’est là qu’il fait la connaissance de l’ambassadeur britannique, Sir Arthur Robertson (David Niven). Peu après

son arrivée, le quartier des ambassades est pris d’assaut… On le voit,avec  Les 55 jours de Pékin , Nicholas Ray s’attaque à reconstituer quelques semaines d’une fresque historique dans les décors dépaysants de la Chine ancestrale où l’impératrice doit faire avec les ruses de ses élites.

Si certains considèrent ce film comme mineur dans la filmographie du cinéaste américain, c’est pourtant une grande épopée, tournée avec des moyens certains, et construite avec une mise en scène limpide. Rien que le plan-séquence d’ouverture où la caméra survole les concessions des pays occidentaux durant la montée des couleurs et où, sonorement, on passe d’un hymne national à un autre est un petit prodige de réalisation.

Pour les besoins du tournage, la ville de Pékin a été reconstituée sur plus de 100 hectares dans les environs de Madrid et de nombreux Chinois vivant en Espagne et dans d’autres pays d’Europe furent engagés pour les besoins de la figuration qui fit appel à 6500 personnes au total.

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Certes, il y a des approximations historiques dans cette fresque : sans parler des costumes et de certaines situations, on y découvre l’impératrice Tseu-Hi dans la pagode du Temple du ciel, or elle aurait dû se trouver dans la Cité interdite. Au demeurant, ce film historique tient toutes ses promesses même si l’originalité d’un Nicholas Ray a plus de mal à s’exprimer dans ce genre de superproduction. Aussi bien dans les scènes spectaculaires de combat – comme celui du commando de nuit qui fait sauter la poudrière impériale – que dans les scènes de foule – la réception de gala où le major Matt Lewis humilie un Boxer – ou les séquences plus intimistes, avec la baronne Nathalie Ivanoff, le réalisateur parvient pourtant à imposer sa griffe.  Néanmoins, le tournage fut si oppressant que Nicholas Ray dût le quitter sans finir le tournage, car victime d’un infarctus. C’est Andrew Marton, vétéran des scènes d’action à grand spectacle, réalisateur de la célèbre course de chars de Ben-Hur et coordinateur des scènes américaines du Jour le plus long qui le termina et on peut penser que la mise en scène finale eût été différente sous la seule férule de Nicholas Ray. Ce fut au demeurant son dernier grand film.

In fine, ce « western » chinois qui mêle une histoire d’amour à une description d’actes héroïques reste prenant en diable. Même si l’on peut regretter que la psychologie du personnage de la baronne campée par Ava Gardner ne soit pas plus développée. A noter aussi la puissance de la partition signée d’un maître du genre :  Dimitri Tiomkin. Pour finir, on peut se souvenir de la formule de Nicholas Ray : « Un film est une femme – on ne peut l’éteindre ni l’allumer. Un film est une femme- un jour il s’en va. »

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