PATRIMOINE
Les 39 marches, d’Alfred Hitchcock (1935) raconte l’histoire d’une longue traque. Devant la caméra du maître du suspense, Robert Donat et Madeleine Carroll joue un couple de circonstances, pris dans un voyage périlleux.
Les 39 marches commence dans un music-hall et se poursuit dans une longe cavale… Richard Hannay se retrouve dans un music-hall londonien. Il aurait mieux fait de s’abstenir… En une nuit, il se retrouve accusé de meurtre d’une jeune femme et contrait de se battre pour sa réhabilitation, car poursuivi par un groupe d’espions allemands comme par la police britannique…

Dans une interview de 1967 où on lui demandait pourquoi il n’avait jamais fait de comédies, Alfred Hitchcock répondait : « Mais tous les films que je fais sont des comédies. » Les 39 marches en apporte une preuve de plus car, malgré la présence des espions prompts à poignarder ceux qui les gênent, malgré le suspense bien mené, le réalisateur n’oublie jamais cette touche d’humour so bristish.
Ainsi dans l’auberge où le faux couple de fuyards se réfugie et doit subir la présence parfois encombrante de la patronne du lieu qui veut à tout prix rendre leur séjour agréable. Ou dans la poursuite du train, quand le serveur du wagon-restaurant doit faire des prouesses d’équilibriste pour ne pas perdre son plateau car bousculé à tour de rôle par le fuyard et les flics.
L’homme savait aussi amener ses acteurs à ce qu’il désirait en leur jouant de mauvais tours. AInsi, le premier jour du tournage, Robert Donat et Madeleine Carrroll devaient jouer la séquence où, menottés l’un à l’autre, ils doivent fuir. Après quelques prises, le réalisateur s’éclipsa après avoir prétendu avoir perdu la clé. Et ne revint les délivrer qu’en fin d’après-midi, ce qui donne une vraie intensité dans leur jeu.
Le film contient déjà quelques moments forts de l’univers d’Hitchcock comme la séquence de la course-poursuite dans le train où le fugitif finit caché par une arche d’un pont métallique qui domine une rivière ou encore celle finale du music-hall où l’artiste à la mémoire prodigieuse prend les espions par surprise les obligeant à se dévoiler. Sans parler des jeux d’ombre et de lumière dans l’appartement de Richard Hanny où il a conduit la mystérieuse femme qui demandait sa protection à la sortie du music-hall.
Rythmé, ménageant quelques plans magnifiques – des cadrages serrés sur la salle de spectacle en ouverture au long zoom arrière qui finit en plan large dans la séquence finale, en passant par bien de belles scènes de nuit – ce polar explore avec inventivité le thème de l’innocent fugitif dont Hitchcock fera ensuite un de ses thèmes favoris dans de petits bijoux comme La Mort aux trousses ou encore L’homme qui en savait trop.
Et puis, fidèle à ses obsessions, Hitchcock a trouvé l’actrice blonde indispensable à son récit : Madeleine Carrroll. C’est elle qui reçoit le baiser fougueux de Robert Donat dans le train, ce qui ne l’empêche pas de le dénoncer aussi sec à la police. Elle retrouvera le cinéaste l’année suivante dans Quatre de l’espionnage.
Bref, ce polar de la période anglaise du réalisateur contient en germe bien des ingrédients qui marqueront les meilleurs futurs opus du maestro du suspense.
