PATRIMOINE
Lion d’or à Venise en 1980, Atlantic City marque l’époque américaine de Louis Malle. Il signe un drame policier avec un duo de choc formé par Burt Lancaster et Susan Sarandon.
Utilisant le cadre hyper-connoté d’Atlantic City, une ville de mirages et de jeux, Louis Malle décrit un passé qui se délite. Sally, serveuse dans un casino, héberge son mari, Dave qui vit maintenant avec sa sœur, dans un vieil immeuble d’Atlantic City. Dave a trouvé de la drogue dans une cabine téléphonique et aidé de Lou, voisin de Sally qui a toujours rêvé d’être un truand, tente de la revendre. Mais reconnu par les propriétaires des sachets de drogue, Dave est abattu. Lou, en possession de cette nouvelle richesse, va pouvoir enfin réaliser ses rêves…
Ce second film de la carrière américaine de Louis Malle, après La Petite, est un film tout à fait abouti. Il décrit, non sans une certaine lenteur, ce petit monde d’une autre époque qui coule des jours plus ou moins paisibles dans Atlantic City, cité balnéaire à la mode des années 60, et qui est en plein déclin, même s’il tente de rivaliser avec Las Vegas. En fait, elle est surtout le port d’attache de tous les rejetés des mégalopoles voisines, dont Dave et la sœur de Sally sont les parfaits représentants, vivant aux crochets des autres et de petites combines.
Les difficultés de la ville sont symbolisées par ces vieux immeubles dans lesquels vivent Lou et Sally et qui sont coincés entre plusieurs grands chantiers immobiliers d’envergure. Du côté des tables de jeu, Louis Malle se plaît à décrire par petites touches ce monde d’illusions et de rêve avec les séquences de cours pour devenir employés de casino et dans lesquelles Michel Piccoli
signe une composition étonnante de manager tour à tour mielleux ou furieux, et vieux libidineux.
Au cœur de ce décor en forme de théâtre un peu miteux se noue, sur fond de trame policière, la relation entre le vieux malfrat et la jeune serveuse du bar à huitres qui rêve à se tirer de ce quotidien sinistre. Aussi à l’aise dans la défroque de ce caïd défraichi que dans les beaux costumes du Guépard, Burt Lancaster joue magnifiquement ce petit escroc fasciné par les pointures du banditisme de sa jeunesse, tels Capone et Siegel. Et, dans les scènes où il observe sa voisine se laver avec du jus de citron – et dans lesquelles l’érotisme est d’une rare subtilité – il y a dans son simple regard tous les rêves d’un amour a priori à sens unique. Quant à Susan Sarandon, une fois encore, elle joue à perfection la partition de cette jeune femme qui veut tout plaquer pour filer à Monaco exercer ce nouveau métier de croupier.
In fine, l’histoire policière est un joli prétexte pour dire cet histoire d’amour incongrue entre cet escroc revenue de bien des rêves et cette jeune qui a, devant elle, bien des années pour réaliser les siens. Porté par la musique de Michel Legrand – elle lui valut d’ailleurs un César – ce drame moderne a permis à Louis Malle de décrocher le mérité Lion d’or au festival de Venise.
