D’AMOUR ET D’ÉCOLOGIE

LE CŒUR DU CONFLIT, de Judith Cahen et Masayasu Eguchi – 1h19

Documentaire

Sortie : mercredi 11 mars 2020

Mon avis : 4 sur 5

Le pitch ?

Il était une fois un japonais et une française qui désiraient faire un film ensemble… Faire un film, comme on fait un enfant, dans un road-movie décalé aux accents de science-fiction burlesque. De Paris à Fukushima, la fiction d’un possible enfant rencontre la réalité du nucléaire…

Ce qui touche dans ce doc ?

Le documentaire affiche dès l’ouverture une question de Shuji Terayama sur fond de cheminées de centrale nucléaire, : « Est-ce que vous semez demain si le monde vient à sa fin ? » . Elle est suivie par une remarque d’Eisenstein soulignant que le conflit est le principe même du montage. Entre ces deux notes, le film se déploie dans un aller-retour entre l’intime et le social, entre l’amour et le nucléaire avec les interrogations du couple de cinéastes qui s’interrogent et nous interrogent. Le duo souligne : « La naissance du film coïncide avec notre rencontre. On peut même dire que nous nous sommes rencontrés en nous lançant dans l’aventure de ce film. Une double aventure artistique et intime. » Comme si faire un film était aussi une façon de mieux se connaître. Mais l’amour est-il soluble dans le nucléaire ?

Bande annonce « le coeur du conflit »

Dans un film en forme de mille feuille, le duo de cinéastes se joue sur le burlesque – les parodies sont étonnantes notamment celle entourant Marguerite Duras -ou sur une forme de légèreté, voire d’autodérision, pour mieux nous interroger sur l’avenir d’un monde placé sous le signe du nucléaire. À cet égard, le retour permanent sur Fukushima – réel avec les séquences filmées dans la zone contaminée- ou virtuelle avec le restaurant qui en porte le nom, Judith Cahen et Masayasu Eguchi signent une fable politique dans laquelle l’irradiation devient l’argument central de l’interrogation.  « Le poète et philosophe Michel Deguy osait dire que « pour nous les français, vu de loin, il y avait une affaire de rime en « shima » entre Fukushima et Hiroshima… » entre le nucléaire civil et le nucléaire de guerre, l’explosion de la Centrale et la bombe, soixante-dix ans plus tôt », souligne Masayasu Eguchi.

Une chose est sûre : par sa construction audacieuse, cet humour en forme de politesse du désespoir, cette interrogation sur le rapport père/fille et mère/fille, l’étonnante coïncidence de la mort du père du cinéaste un quart d’heure avant le choc du Kukushima, ce documentaire est une subtile fable politique et humaine.

 

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