Sur les écrans le 12 février, Queen & Slim, de Melina Matsoukas, qui retrace la cavale d’un jeune couple entre l’Ohio et la Floride, a suscité bien des réactions de la critique africaine-américaine.
Queen & Slim est né de la rencontre entre James Frey, auteur de livre à succès, avec l’actrice et scénariste Lena Waithe. James Fray a eu l’idée de cette cavale de deux jeunes afro-américains (campés par Jodie Turner-Smith et Daniel Kaluuya, vu dans Get Out), suite à l’homicide involontaire d’un policier. Scénariste engagée et lauréate d’un Emmy Award pour la série Master of None, Lena Waithe a apporté une touche d’authenticité à cette histoire. Rien que le nom de l’héroïne en dit long : aux yeux de Lena Waithe, toute les femmes noires sont des « queens », des « reines ». Slim, lui, est un terme familier et un rien désuet avec lequel les blacks avaient l’habitude de se désigner eux-mêmes. Tou les autres personnages du film n’ont pas de nom, et étaient, dans le script, définis par leur description ou une fonction. « Il ne s’agissait pas tant de leurs noms, mais de ce qu’ils étaient. On appelle rarement les gens qu’on croise par leurs prénoms, on s’y réfère plus souvent en tant que personnes. Je voulais que le public se souvienne de qui ils étaient, ce qu’ils représentaient et pas de leurs prénoms » souligne la scénariste.
Bien sûr, l’histoire d’amour entre Queen et Slim est le prétexte d’une histoire qui explore la question du racisme et de la violence policière. Aux États-Unis, plusieurs journalistes ont souligné combien il était rare que sorte sur grand écran une histoire d’amour aussi forte et dont les protagonistes ne sont pas des blancs. D’origine juive, grecque et afro-jamaïcaine, Melina Matsouka, 39 ans, est passé derrière la caméra après avoir signé bien des clips. Elle a aussi contribué à modeler l’iconographie de Black Lives Matter (La vie des Noirs compte), ce mouvement lancé en 2013 pour montrer les brutalités policères dont sont systématiquement victimes les Noirs aux États-Unis. Elle a ainsi signe le clip de la chanson Formation de Beyoncé, critiqué par certains membres des forces de l’ordre pour avoir montré une voiture de police qui s’enfonce dans l’eau dans un décor rappelant les inondations provoquées par l’ouragan Katrina.
Autant dire que Queen & Slim a déjà suscité bien des débats passionnés aux États-Unis entre partisans inconditionnels du film et ceux qui reprochent à l’opus de ne montrer qu’une face sombre de la réalité et d’être esthétisant, au contraire d’un film comme BlacKkKansman, le dernier Spike Lee.

Une chose est sûre, Queen & Slim est un film ni neutre, ni tiède. Également producteur du film, Daniel Kaluuya souligne : « Il est important pour moi de travailler dans des œuvres qui mettent en avant ceux qui n’ont ni la parole ni de visibilité dans les médias, et c’est exactement le but de ce film. » Avant d’ajouter : « Il était important pour moi de collaborer à sa mise en circulation, afin qu’un maximum de gens puisse le voir ».
