
LES TRADUCTEURS, de Régis Roinsard – 1h45
Avec Lambert Wilson, Olga Kurylenko, Riccardo Scarmarcio
Sortie : mercredi 29 janvier 2020
Mon avis : 4 sur 5
Le pitch ?
Isolés dans une luxueuse demeure sans aucun contact possible avec l’extérieur, neuf traducteurs sont rassemblés pour traduire le dernier tome d’un des plus grands succès de la littérature mondiale. Mais lorsque les dix premières pages du roman sont publiées sur internet et qu’un pirate menace de dévoiler la suite si on ne lui verse pas une rançon colossale, une question devient obsédante : d’où vient la fuite ?
3 raisons d’y aller ?
Un huit-clos étouffant à souhait. Derrière un titre assez plat il faut le dire, et un contexte – des traducteurs réunis dans une belle demeure pour traduire dans le plus grand secret un best-seller, Régis Roinsard réussit la gageure de signer une histoire policière de haute tenue où il multiplie les fausses pistes autour de la figure de cet éditeur aussi altier qu’arrogant et dominateur. Un retour au premier plan du réalisateur, sept ans après Populaire qui l’a conduit à voyager dans le monde entier une année durant. L’occasion de trouver l’inspiration de ce scénario. Il raconte : « Je suis tombé sur plusieurs articles autour de la traduction du livre de Dan Brown, Inferno. Douze traducteurs internationaux avaient été enfermés dans un bunker en Italie pour traduire son dernier roman. Ce qui m’a interpellé et fasciné, c’est qu’un produit culturel nécessite qu’on le protège comme s’il s’agissait de pierres précieuses. À partir de là m’est venu le célèbre « Et si… », propre à la genèse de toute fiction: « Et si le livre était volé, piraté malgré toutes les précautions prises ? Et si on demandait une rançon pour ne pas le publier sur le Net ? » J’avais mon sujet ! »
Une réalisation qui tient en haleine. Jouant aussi bien sur la beauté austère de ce château isolé, s’appuyant sur une description précise du travail de ces traducteurs venus du monde entier – et dont certains, métier oblige, se connaissent – Régis Roinsard sait, par des retours en arrière, des moments où la caméra s’attarde sur une situation et d’autres où elle passe la vitesse supérieure, tenir en haleine le spectateur, sans jamais donner trop d’indices sur la vérité de cette escroquerie.
Lambert Wilson magnifique. Avec le temps, le comédien prend une épaisseur de plus en plus évidente et il joue un salaud magnifique qui se comporte plus en mafieux autoritaire – un effet renforce par les gardes du corps slaves – prêt à tout pour reprendre la main. Le fait qu’il soit bien entouré – Olga Kurylenko apporte une touche d’étrange avec sa tenue immaculée; Riccardo Scarmarcio joue un italien caricatural à souhait quand Eduardo Noriega joue avec finesse un traducteur frappé de bégaiement quand Alex Lawther peut faire passer bien des émotions sous ses airs juvéniles- renforce encore la justesse de son jeu.

Entre Agatha Christie et Alfred Hitchcock (le personnage principal du roman ne se nomme-t-il pas Rebecca ?), Les Traducteurs est une petite réussite du genre.
