Yssur Danielovitch Demsk – alias Kirk Douglas – est né le 9 décembre 1916 à New-York. Dans une riche biographie doublée d’une filmographie commentée, Georges Di Lallo revient sur le parcours de ce dernier géant d’Hollywood dans son livre(*) consacré à un artiste libre qui a fêté ses 103 ans.
S’attaquer à Kirk Douglas n’est pas tache facile tant cet acteur-producteur a fait une multitude de choses dans sa vie. Raconter un tel artiste est d’autant d’autant plus ardu que l’homme a signé une des meilleures autobiographies qui soit dans l’univers du cinéma : le premier tome, Le Fils du chiffonnier est un modèle du genre. Enfin, Kirk Douglas n’est pas homme à se voiler la face. Dans son livre, Georges Di Lallo rapporte une réflexion de la star non dénué d’humour : « S’il y a quelque chose que je hais, c’est la médiocrité… Je pense qu’une biographie ne peut pas être entièrement biographique. J’ai dit une fois que si je voulais dire la vérité, je devais écrire un roman, que si je voulais mentir, j’écrirais un biographie. Ce que je veux dire, c’est qu’il est difficile de dire la vérité sur soi-même. »
Georges Di Lallo fait lui un travail minutieux dans cette somme consacrée à un artiste qui n’a jamais barguigné avec son sens de l’honneur, de la liberté et de la justice. On se souvient notamment comment, durant la préparation de Spartacus, il prit la défense de Dalton Trumbo, scénariste mis au ban de la communauté d’Hollywood, durant les années sombres de la chasse aux sorcières.
Infatigable travailleur, Kirk Douglas est aussi connu pour son franc parler. Comme le rapporte le livre, quand il est contacté pour jouer, avec bien d’autres stars, pour jouer le général Patton dans Paris brûle-t-il ?, il exige -et obtient- le cachet de 50 000 dollars, une belle somme pour une prestation courte. Son commentaire : « Si je dois me prostituer, il faut que je sois payé. »
Douglas producteur fut aussi un travailleur acharné et consciencieux : on le mesure par exemple sur le tournage des Vikings (1958) où, en quête d’authenticité, il veille au moindre détail. Le réalisateur Richard Fleisher écrira plus tard : « Je pouvais avoir tout ce que je désirais. J’avais une flotte de vaisseau sous mes ordres, des armées, etc. Je pense réellement qu’à la vision du film, on s’aperçoit que tout cet argent dépensé se retrouve sur l’écran. »
Incarnant l’artiste de gauche, quand son ami John Wayne symbolisa celui de droite, Kirk Douglas ne manque jamais d’humour dans ses déclarations. Ainsi quand il rapporte comment John Wayne justement lui reprocha d’avoir campé le peintre maudit et suicidaire en ces termes : « Mais enfin, Kirk comment as-tu pu jouer un rôle comme ça ? il reste tellement peu d’acteurs de notre trempe. Il faut jouer des personnages durs, forts, pas de ces tapettes faiblardes. »
Diminué par plusieurs accidents cérébraux qui l’ont laissé aphasique, frappé par plusieurs drames familiaux -telle la mort tragique de son fils Eric, d’une overdose en 2004 – Kirk Douglas n’a jamais cessé de témoigner. Ainsi en 2016, il a publié une tribune dans le Huffington Post, destinée à ses concitoyens, où il se livrait à un réquisitoire anti-Trump.
Le livre de Georges Di Lallo rend un bel hommage à un homme et un artiste qui n’ont jamais renié certaines valeurs. Il est juste dommage que la photo de la couverture, un rien vintage, ait un côté un brin suranné.
(*) Ed. Riveneuve
