LILLIAN, de Andreas Horwath – 2h08
Avec Patrycja Planik
Sortie : mercredi 11 décembre 2019
Mon avis : 3 sur 5
Le pitch ?
Lillian, échouée à New York où elle a tourné dans des films de sexe, décide de rentrer à pied dans sa Russie natale. Seule et déterminée,elle entame un long voyage à travers l’Amérique profonde pour atteindre l’Alaska en tentant de traverser le détroit de Béring…
2 raisons d’y aller ?
La vision d’une autre Amérique. En tentant de reconstituer la longue errance vécue par une jeune femme russe, en 1927 – aujourd’hui, elle est toujours considérée comme disparue – Andreas Horwath signe, avec son premier long métrage de fiction, un portrait d’une autre Amérique : celle des pauvres gens, des laissés-pour-compte, des réunions d’Indiens qui tentent de préserver leur territoire de la concupiscence des multinationales… Commentaires du réalisateur : « Si on imagine des situations dans lesquelles on pourrait se retrouver en marchant à travers l‘Amérique du Nord, des histoires se présentent à l‘esprit. Mais le film est essentiellement le produit de l‘improvisation et du hasard. Il n‘y avait pas de scénario. Dès le départ, il était prévu que des rencontres fortuites soient intégrées dans l‘histoire du film et déterminent son récit. »
On ne peut qu’être étonné par le résultat, tant le réalisateur parvient à nous faire ressentir le cœur d’un pays à travers certains instants de la banalité quotidienne. Il a eu une excellente idée de montrer que la seule chose qui unit tous ces habitants, ce sont les émissions de radio qui vendent, avec un ton de faux optimiste, de la bonne humeur quotidienne et jouent toutes sur le bulletin météo.
S’il y a des moments de solidarité durant ce long voyager – elle est souvent le fait des moins fortunés – l’histoire montre bien comment, dans cette Amérique profonde, le beauf est présent. C’est ce shérif qui, dans un bar, pose la question à un vieux copain sur les femmes de l’Iowa : « Comment appelle-t’on ici une jolie fille ? » « Une touriste ! ». De même, la rencontre avec le conducteur du pick-up montre une humanité pas vraiment reluisante.
Une actrice bluffante. Avec un rôle muet de bout en bout, il fallait un vrai talent pour tenir la route sur un film qui dure plus de deux heures. Patrycja Planik, photographe et danseuse, est étonnante, tant elle parvient à faire passer une infinité d’émotions dans son visage, dans le plus petit geste du quotidien. Pour expliquer comment elle a appréhendé ce personnage, elle dit : « Lillian Alling a accompli sa trajectoire il y a cent ans, le monde d’aujourd’hui est complètement différent mais son histoire reste pertinente. Elle est devenue le point de départ pour construire une histoire universelle autour de la quête d’identité, une lente disparition dans un accord parfait avec la nature. »
Si la dernière partie du film tire un peu en longueur (la scène de la chasse à la baleine casse un peu le rythme de cette errance), Andreas Horwath parvient à nous concerner par cette histoire qui sort vraiment de l’ordinaire. Et, en jouant sur des plans larges sur des paysages magnifiques et d’une variété extraordinaire, et des plans plus serrés sur Lillian, il parvient à maintenir notre curiosité en éveil, malgré certaines redites des situations.
Véritable OVNI cinématographique, Lillian est un film qui ne peut laisser indifférent.

