UN COMBAT DE VIEUX

VOUS ÊTES JEUNES VOUS ÊTES BEAUX, de Franchin Don – 1h40

Avec Gérard Darmon, Josiane Balasko, Patrick Bouchitey, Denis Lavant

Sortie : mercredi 2 octobre 2019

Mon avis : 3 sur 5

Le pitch ?

Lucius, 73 ans, vit seul et modestement. Un jour, il fait la connaissance de Lahire qui lui propose d’améliorer son maigre quotidien en participant à des combats de boxe clandestins. Par nécessité et parce qu’il sait que ses jours sont comptés, Lucius accepte la proposition. Fasciné par cet univers, il prend goût à cette nouvelle existence. Cette étrange expérience   bouleverse complètement sa vie, sous les yeux de Mona, la seule personne dont il est proche…

Ce qui touche dans ce film ?

Étrange ce premier film de Franchin Don, arrivé en France en 2003 pour suivre une école de cinéma, avant de partir en Chine comme chef opérateur puis de revenir en France pour tourner ce drame. Un scénario qui lui a été inspiré par la canicule de 2003 qui fit 20 000 morts. Il poursuit : « J’ai été très choqué parce que, dans la culture chinoise, on s’occupe des personnes âgées qui souvent, vivent à la maison, avec nous, en tout cas pour la génération de mes parents. J’avais du mal à imaginer comment on pouvait les laisser seuls. Depuis ce moment-là, j’ai eu envie de faire un film sur la solitude des personnes âgées. »

L’originalité du film, c’est d’avoir adapté avec Tarik Noui son roman À nos pères, une espèce de fable moderne qui imagine comment des « vieux » survivent grâce à des combats de boxe. « « À travers ces duels imaginaires, je veux montrer que le fait qu’on ne permette pas aux personnes âgées d’avoir accès à une fin de vie décente, serait l’ultime dérive. Ici, elle est montrée à travers l’organisation mafieuse de combats de « vieux ». Cette éventualité me paraît tellement probable qu’elle pourrait faire la Une des journaux, un jour prochain« , constate Franchin Don.

Si le film manque parfois, surtout dans la deuxième partie, de rythme – peut-être pour se mettre au diapason de la vie de ces personnages âgées qui vivent sans vrais repères ?- il pose, non sans une certaine cruauté, la question des « vieux » dans ce monde moderne.

Pour donner de la vraisemblance à ce récit, il fallait des acteurs qui n’hésitent pas à se mettre à nu. Et le duo formé par Josiane Balasko et Gérard Darmon est, à cet égard, une vraie réussite. L’un comme l’autre n’ont pas hésité une seconde à jouer avec les atteintes de l’âge. Confidences de Gérard Darmon : «  J’ai pris quelques kilos pour faire ce film car je voulais qu’il y ait une sorte de déchéance physique pour mettre en avant tout ce qui se passe quand on vieillit. C’était un défi et une façon de franchir le pas. Dans ce métier, quand on passe la barre du ridicule, c’est à ce moment-là qu’on intéresse les autres. Ce n’étais pas simple d’emblée à accepter mais j’ai osé le faire en me disant que ce n’était pas tout à fait moi, mais mon personnage. »

Si le film peut dérouter par un mélange de réalisme et d’onirisme gratuit -l’irruption de l’enfant qui vient taper à la vitre – il a le mérite de l’originalité. Et les scènes sordides de boxe avec un Monsieur Loyal, admirablement campé par Denis Lavant (ci-dessus), apportent une vraie touche de folie dans la description de ce monde déshumanisé.  Sans oublier Patrick Bouchitey, toujours à l’aise quand il s’agit de jouer des types déjantés qui tentent de rebondir malgré tout.

Il aurait sans doute oser aller plus loin pour que cette fable prenne toute sa dimension « politique ». Cela dit,  pour un premier film, Franchin Don fait entendre sa différence.

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