Avec l’adaptation en film d’animation du roman de Yasmina Khadra, Les Hirondelles de Kaboul, sur les écrans le 4 septembre, Zabou Breitman a surpris son monde.
Pour Zabou Breitman et sa co-réalisatrice, Eléa Gobbé-Mévellec – dessinatrice d’animation sur Ernest et Célestine notamment – signer un film d’animation était une première. L’histoire ? Été 1998,
Kaboul en ruines est occupée par les talibans. Mohsen et Zunaira sont jeunes, ils s’aiment profondément. En dépit de la violence et de la misère quotidienne, ils veulent croire en l’avenir. Un geste insensé de Mohsen va faire basculer leurs vies.
Quand le producteur Julien Monestiez lui a proposé cette adaptation, Zabou a accepté sous certaines conditions : « Je l’ai dit d’emblée : il faudra que ça soit très bien joué. Pas seulement bien parlé, mais que les mouvements des personnages, leur rythme, leur respiration, soient justes ». Elle a ensuite choisi sa coréalisatrice, Eléa Gobbé-Mévellec, après un casting de graphistes : les postulants devaient proposer une direction artistique et un graphisme
complet en s’inspirant du scénario. Dans l’adaptation du roman de Yasmina Khadra, Zabou a pris quelques libertés : elle a ainsi développé les interrogations de Mohsen et Zunaira sur leur rêve de quitter Kaboul ou fait de Zunaira une professeur de dessin plutôt qu’une avocate. « Je trouvais ça beau que l’héroïne d’un film d’animation se dessine elle-même. Sachant que la représentation de l’être humain est interdite chez les talibans, en faire un dessin animé, c’était le comble. Mais qu’elle se dessine, et nue, c’était encore mieux » dit-elle.
Le choix d’un film d’animation leur a permis de plus jouer sur l’imaginaire et de rendre les images
moins dures. Commentaire de Zabou : « L’animation nous rendait légitimes : de quel droit, sinon, aurait-on pris la parole en tournant un film en prises de vues réelles à Kaboul ? »
L’enregistrement des voix s’est passé durant quatre jours et les comédiens, en costumes, jouaient leur scène comme s’il s’agissait d’une pièce de théâtre. « Tout ce qui a été inventé là, les respirations, les toux, les pauses, a servi ensuite à l’animation », ajoute Zabou. Pour l’anecdote familiale, le père Zabou, l’auteur et comédien Jean-Claude Deret (il a notamment signé Thierry la Fronde), disparu en décembre 2016, joue le personnage de Nazish.
Présenté à Cannes dans la sélection Un certain regard, Les Hirondelles de Kaboul vient de marquer le Festival du film francophone d’Angoulême où il a remporté le Valois de Diamant. Celui de la Musique est allé à Alexis Rault. Revenant sur cette nouvelle aventure dans les colonnes de L’Obs, Zabou Breitman conclue : « Je trouve d’autant plus réjouissant de faire un film d’animation que les talibans interdisent de représenter l’être humain. C’est déjà pour moi un acte de résistance. »
