Premier rôle de la mannequin et créatrice de lingerie Zahia Dehar dans le nouveau film de Rebecca Zlotowski. Dans Une fille facile, elle campe une femme indépendante qui se joue des hommes en se servant de ses charmes…
Une fille facile est construit sur une histoire simple et carrée. Naïma (Mina Farid) a 16 ans et vit à Cannes. Alors qu’elle se donne l’été pour choisir ce qu’elle veut faire dans la vie, sa cousine Sofia( Zahia Dehar) , au mode de vie attirant, vient passer les vacances avec elle. Ensemble, elles vont vivre un été inoubliable…
Pour ce lancer dans ce nouveau film, il a fallu le déclic d’une rencontre à Rebecca Zlotowski. Après avoir croisé Zahia Dehar, elle a eu une espèce de révélation. Elle raconte : « Il faut à tout prix que j’écrive un film de pulsion, de soleil, de sexe et de plaisir. À ce moment-là, je suis également en train de me lancer dans la fabrication d’une série, Les Sauvages (tournée après le film et qui sera diffusée en septembre sur Canal Plus), et j’ai la grande crainte de passer deux années de ma vie dans un projet sombre et dense, de passer à côté de la joie du cinéma. Donc je me tourne vers ce film pour y trouver ce qui n’appartient qu’au cinéma, avec la liberté que seul le cinéma permet, qui porterait une parole libre et personnelle, moins collective que la série. » L’intrigue est née dans la foulée après que la réalisatrice a lu un témoignage sur la relation entre deux jeunes femmes et des hommes mariés, bien sûr, qui accostaient dans des yachts de luxe dans les ports de la Côte d’Azur. Le récit de cette jeune femme l’a touchée. Elle ajoute : « Contre toute attente, et en dépit de la teinte morale que je pouvais donner malgré moi à cet échange, la jeune femme racontait à la première personne la douceur de cet été, sa caresse constante, sa courtoisie – si on peut dire son romantisme, malgré l’hypocrisie qui sous tendait leurs rapports avec ces hommes. »
Quant au choix de Zahia Dehar, connue jusque là pour avoir nourri la chronique people et faits divers avec un sportif célèbre, il s’est vite imposée à Rebecca Zlotowski, qui ne tarit pas d’éloges sur sa comédienne débutante : « C’est qu’on soit si étrangères en tous points qui m’attirait au départ : la manière qu’a Zahia de mettre l’accent sur le féminin dans ce qu’il a de plus exacerbé et éculé – docilité, silence, sophistication, déguisement de geisha, la faisant basculer dans une esthétique Camp dont elle est pleinement consciente. J’en étais
là quand je reçois un signe de sa part sur Instagram. Je suis surprise qu’elle connaisse même mon nom… Je vais voir ses vidéos et là je tombe en arrêt quand je l’entends parler. Je découvre qu’elle parle d’une manière extraordinairement élégante, littéraire, anachronique, pas un seul mot d’argot, une retenue, une pudeur, un accent insondable d’une Bardot libanaise, syrienne ou italienne, impossible à définir, à l’opposé des jeunes femmes qui gravitent dans la télé-réalité. Le phrasé d’un personnage d’un film d’Eric Rohmer qui me séduit tout de suite. »
Lors du dernier Festival de Cannes – le film a obtenu – Zahia Dehar déclarait : « Une fille facile, ce n’est pas péjoratif, c’est une femme qui s’épanouit dans sa sexualité à l’égal d’un homme. Il est rare de voir une femme comme Sophia célébrée comme cela. » L’ancien fait divers qui a révélé la désormais comédienne au grand public – une sordide histoire mêlant football et escort girl l’année 2010 – n’est sûrement pas étranger à la manière dont les médias s’intéressent à cette jeune femme qui avoue que l’affaire lui a fait beaucoup de mal même si elle a pu compter sur le soutien de sa mère. Elle a confié aux Inrocks: « Ma mère l’a appris à la télévision et a été très choquée. Mais elle n’a à aucun moment été agressive avec moi. Elle était plutôt inquiète. J’étais très mal. Jusqu’à ce que je me dise que ce que j’avais fait n’était pas un crime. Je n’avais pas à me dire que j’étais coupable d’un penchant sexuel. »
Aujourd’hui, le succès – s’il est là – de cette Fille facile va permettre à Zahia Dehar de montrer une toute autre facette de son talent.
