DIEU EXISTE, SON NOM EST PETRUNYA, de Teona Strugar Mitevska – 1h40
Avec Zorica Nusheva, Labine Mitevska
Sortie : mercredi 1er mai 2019
Mon avis : 3 sur 5
Le pitch ?
A Stip, petite ville de Macédoine, tous les ans au mois de Janvier, le prêtre de la paroisse lance une croix de bois dans la rivière et des centaines d’hommes plongent pour l’attraper. Bonheur et prospérité sont assurés à celui qui y parvient. Ce jour-là, Petrunya se jette à l’eau sur un coup de tête et s’empare de la croix avant tout le monde. Ses concurrents sont furieux qu’une femme ait osé participer à ce rituel. La guerre est déclarée mais Petrunya tient bon : elle a gagné sa croix, elle ne la rendra pas.
Ce qui touche dans le film ?
Plongée dans une Macédoine où, comme le dit la reporter, on nage en plein Moyen-Âge, cette comédie dramatique est construite sur une histoire un brin surréaliste. Car le plongeon de Petrunya – une jeune femme mal dans sa peau car elle ne trouve ni job, ni amoureux – met une pagaille monstre dans les rites de cette petite ville où, jamais, une femme n’a osé se mettre à jouer dans la cour des mecs pour cette course rituelle. Commentaires de Teona Strugar Mitevska qui s’est inspiré d’un incident identique survenu en 2014 : « En effet, les femmes ne sont pas autorisées à participer à l’événement. On a donc essayé de lui reprendre la croix, mais la jeune femme a tenu bon. Le lendemain, elle a donné une interview à la station de radio locale, incitant les femmes à plonger pour récupérer la croix à l’avenir. La population l’a traitée de folle, de femme perturbée… « Avec une réalisation qui prend parfois des allures de reportage, ce film décrit avec précision cet emballement populaire sous les yeux d’une reporter locale, Slavica, qui règle ses problèmes conjugaux au téléphone tout en tentant de couvrir au plus près les évènements. Et incarne une forme de solidarité féminine dans ce monde machiste et violent.
En toile de fond, on mesure tout le poids du clergé orthodoxe qui n’ose pas braver la crédulité des fidèles – ou qui a sans doute tout intérêt à les maintenir dans un tel obscurantisme- et la cinéaste décrit ainsi le combat entre tradition et modernité.
Et puis, il y a le personnage de Petrunya -venue d’une troupe de théâtre comique, Zorica Nusheva est tout à fait extraordinaire – qui finit par gagner la partie, malgré les agressions verbales et physiques dont elle est victime et malgré aussi les intimidations des flics. Même si, dans cette fable moderne, on peut douter de la possibilité de Petrunya de retrouver sa place dans un pays si arriéré. La cinéaste évoque d’ailleurs ce qui est arrivé à la jeune fille qui a vécu cette histoire. « J’ai appris que la vraie jeune femme qui a attrapé la croix réside désormais à Londres… dit-elle. Il faut reconnaître que sa vie aurait été compliquée si elle était restée à Stip. »
En découvrant cette histoire tirée d’un fait réel, on se prend à penser à Bakounine qui souligné que si Dieu vraiment existait, il faudrait vraiment s’en débarrasser !

