LA SOLITUDE DE LA FEMME DE CHAMBRE

LA CAMARISTA, de Lila Avilés – 1h42

Avec Gabriela Cartol, Teresa Sánchez

Sortie : mercredi 17 avril 2019

Mon avis : 3 sur 5

Le pitch ?

Eve, une jeune femme de chambre travaille dans un luxueux hôtel de la ville de Mexico. Pour trouver la force et le courage, nécessaires pour affronter sa monotonie quotidienne, elle s’évade à diverses fantaisies à travers les objets personnels laissés par les invités de l’hôtel.

Et alors ?

Ayant fait ses armes au théâtre dans la mise en scène notamment, Lila Avilés avait d’abord envisagé de raconter cette histoire sur les planches. Elle raconte : « Le livre de la vidéaste et photographe française Sophie Calle, intitulé Hôtel, est à l’origine du film. L’artiste s’était faite engager comme femme de chambre dans un hôtel à Venise. Elle agissait comme une espionne, photographiant les effets personnels, les poubelles et les vêtements laissés par les clients dans les chambres. Ces objets lui permettaient de comprendre leurs comportements et leurs personnalités. » Avant de poursuivre :  « Cette idée de voyeurisme me séduisait pour imaginer à mon tour la vie des autres, à partir de ce qu’ils laissaient en leur absence. Je ne connaissais pas vraiment le milieu des femmes de chambre mexicaines et ce n’est que lorsque j’ai commencé à faire des répétitions à l’hôtel Presidente que j’ai saisi la vraie nature du travail. J’ai commencé à échanger avec elles et à les suivre au jour le jour, sur une longue période. En comprenant les femmes sous les uniformes, j’ai pu forger mon regard d’artiste et à partir de là, je savais que je devais tourner mon film quoi qu’il advienne. »

Tourné dans un vrai hôtel « Le Presidente », luxueux, qui domine Mexico, La Camarista donne à voir le quotidien d’une de ces femmes de chambre anonymes qui n’ont quasiment pas de vie privée. Les rares temps de liberté sont consacrés pour Eve à prendre des cours – organisé par l’hôtel il faut le signaler-  pour passer le baccalauréat alors qu’elle sait à peine lire. On la voit d’ailleurs compulser studieusement un ouvrage alors qu’elle s’isole aux toilettes. C’est cette précision des détails quotidiens qui confèrent à cette fiction un côté documentaire.

S’il peut paraître un brin longuet, d’une mise en scène vraiment très sage,  le film comporte quelques moments d’une grande justesse comme celle où une richissime argentine  confie son bébé à Eve le temps de prendre une douche et feint une certaine familiarité avec elle pour obtenir un menu service ou celle où la femme de chambre se déshabille sous les yeux d’un laveur de vitre qui joue les voyeurs immobiles…

En permanence, cette histoire montre comment deux mondes se croisent sans se voir, comment ces figures anonymes et discrètes ont une vie cachée. Pour faire vivre une telle tragédie quotidienne, il fallait une actrice d’une grande expressivité et jouant sur une grande économie de mots : c’est le cas avec l’étonnante Gabriela Cartol.

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