UNE JEUNE FEMME PERDUS DANS BUDAPEST

Pas facile de faire oublier le choc d’un film comme Le Fils de Saul, terrifiante plongée à Auschwitz, couronné par bien des prix. Avec Sunset, qui sort le 20 mars, László Nemes nous conduit dans le Budapest de 1913 à la suite d’une femme perdue.

László Nemes pensait à ce film avant même de tourner Le Fils de Saul. L’histoire ? Nous sommes en 1913, au cœur de l’empire austro-hongrois. Irisz Leiter revient à Budapest après avoir passé son enfance dans un orphelinat. Son rêve de travailler dans le célèbre magasin de chapeaux, autrefois tenu par ses parents, est brutalement brisé par Oszkar Brill le nouveau propriétaire. Lorsqu’Írisz apprend qu’elle a un frère dont elle ne sait rien, elle cherche à clarifier les mystères de son passé. A la veille de la guerre, cette quête sur ses origines familiales va entraîner Irisz dans les méandres d’un monde au bord du chaos.

László Nemes raconte comment ce film a vu le jour : « Le projet a pris forme juste avant le financement de mon premier film. Sunset vient d’obscures interrogations personnelles sur l’Europe centrale, sa littérature, son cinéma, sa peinture et même sa photographie. Je ne suis parti de rien de spécifique, mais plutôt d’impressions. Rétrospectivement, je pense que des écrivains comme Kafka et Dostoïevski ont eu un certain impact sur moi. Les personnages de Kafka se trouvent face à un mur qu’ils ne peuvent pas franchir. C’est fascinant comme Kafka donne le sentiment qu’il est parfaitement naturel qu’il existe des obstacles infranchissables. C’est tout à fait le contraire de ce que représente le nouveau monde américain, à savoir la promesse que tout est faisable. En Europe de l’Est, rien n’est faisable. En tout cas, le récit lui-même est totalement original. »Avec cette histoire d’une jeune fille perdue (campée par Juli Jakab), László Nemes plonge le spectateur dans une société qui est au bord de la guerre, le fait pénétrer dans des bas-fonds où œuvrent des cellules anarchistes mais aussi dans les salons bourgeois où flottent des relents d’antisémitisme. Un monde qui est tout proche d’exploser.

Comme dans Le Fils de Saul, on note chez le cinéaste la volonté de filmer au plus près le visage et la nuque d’Irisz comme s’il voulait nous faire comprendre ses pensées les plus intimes, profondes. « Je voulais faire un film qui plonge le spectateur dans le labyrinthe mental du personnage principal » conclue-t-il. Avec László Nemes, le cinéma est un poste idéal d’observation des méandres de l’âme humaine.

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