Sur les écrans le 13 mars, Ma vie avec John F. Donovan, de Xavier Dolan,  sort en France alors que celle-ci a été ajournée partout, y compris au Québec. Zoom sur la nouvelle aventure du cinéaste iconique.

Dans Télérama, fin février, Xavier Dolan avouait que le tournage de son premier film américain n’avait pas été une partie de plaisir : « Tout était nouveau pour moi, j’avais l’impression de sortie de ma cuisine, c’est-à-dire de ma pratique artisanale du cinéma. » Joué par des stars internationales – de Natalie Portman à Susan Sarandon en passant par Jessica Chastain(finalement coupée au montage) et Kit Harington – le film raconte l’histoire d’un jeune homme. Dix ans après la mort d’une vedette de la télévision américaine, ce jeune acteur se remémore la correspondance jadis entretenue avec cet homme, de même que l’impact que ces lettres ont eu sur leurs vies respectives.

Xavier Dolan a plongé dans le scénario après avoir eu une longue conversation avec Jacob Tierney, un réalisateur et scénariste canadien dont il venait de lire un scénario qui l’avait passionné. Il raconte : « Je voulais que la dramaturgie de ce nouveau film soit la plus aboutie – et la plus professionnelle – possible. Il avait vécu un deuil très éprouvant et après le 25 décembre, j’avais l’habitude de passer les vacances seul, alors même que ma famille mettait le cap sur une destination ensoleillée. Tandis que Noël approchait, il nous semblait plus judicieux de nous jeter à corps perdu dans le travail que de nous complaire dans la solitude. C’est à ce moment-là qu’on a entamé le travail d’écriture de Ma vie avec John F. Donovan. J’ai rêvé de faire un film ambitieux sur la notoriété et l’identité. Je m’étais dit que ce projet allait tourner en dérision la tendance – voire l’instinct – d’Hollywood à l’uniformisation et à la standardisation. »

Lors de la première mondiale au festival de Toronto, où l’accueil du film a été contrasté, Xavier Dolan a choisi de lire la lettre qu’il avait écrite quand il avait 8 ans à son idole : Leonardo DiCaprio. C’est dire si sa propre vie a inspiré l’un des deux personnages principaux du film, Rupert Turner (Jacob Tremblay) , ce jeune acteur américain qui est rejeté par les autres gamins et qui décide d’écrire au comédien vedette de la série qu’il adore, un certain John F. Donovan (Kit Harington). C’est le début d’une longue relation épistolaire, restée longtemps cachée, jusqu’au jour où elle refait surface, mais salie, quand Donovan tombe en disgrâce après que son homosexualité a été révélée… Jouant entre présent et passé, ce drame est alors construit, dix ans après la mort de Donovan quand Turner, devenu adulte, se raconte à une journaliste peu adepte de ce type d’histoire. Et, comme toujours chez le cinéaste canadien, un tel sujet permet aussi d’évoquer le personnage de la mère, centrale dans bien de ses films.

 

Pour Xavier Dolan, ce film est l’occasion de porter un regard critique sur un milieu qui l’a fait rêver, mais dont il connaît aujourd’hui bien des rouages. Cette ode au cinéma est aussi pour lui l’occasion de montrer les difficultés très grandes encore aujourd’hui pour une vedette du cinéma ou de la télévision de dire son homosexualité sans risquer d’être frappé d’ostracisme.

S’il a supprimé les séquences  – « un choix extrêmement difficile« – avec Jessica Chastain – avec laquelle il est pourtant très lié – c’est parce que son personnage de redoutable rédactrice en chef d’un journal people changeait le ton de son film. Pour couper court à toute polémique, l’actrice a rapidement écrit sur son compte Instagram : « Ne vous inquiétez pas, j’étais au courant avant l’annonce. Tout cela a été fait avec le plus grand respect et amour. Je suis impressionnée par ta résolution à raconter une histoire, à être un artiste à chaque moment. Je t’aime et j’ai déjà hâte d’être à notre prochaine collaboration dans l’art et dans la vie. »

En tout cas, un nouveau film de Xavier Dolan ne suscite jamais des réactions tièdes. Au public français de juger désormais sur pièce…