LAUREL ET HARDY ENTRE LES LIGNES

Stan & Ollie, sur les écrans le 6 mars, retrace les derniers tours de piste de Laurel Hardy. L’occasion de replonger dans l’histoire de ce duo formidable à travers une biographie très documentée : Laurel et Hardy : la véritable histoire (*).

Dans Stan & Ollie, Jon S. Baird revient sur les dernières années – difficile – du duo. Le pitch ? Nous sommes en 1953. Laurel et Hard  se lancent dans une tournée à travers l’Angleterre. Désormais vieillissants et oubliés des plus jeunes, ils peinent à faire salle comble. Mais leurs capacités à se faire rire mutuellement et à se réinventer vont leur permettre de reconquérir le public, et renouer avec le succès.
Même si le spectre du passé et de nouvelles épreuves ébranlent la solidité de leur duo, cette tournée est l’occasion unique de réaliser à quel point, humainement, ils comptent l’un pour l’autre…

C’est la lecture d’un livre, Laurel & Hardy : The British Tours de AJ Marriot, qui a inspiré le scénariste Jeff Pope. Il raconte : « Il y a cette incroyable photo de ces deux types, qui avaient été des icônes du cinéma, et qui séjournaient dans de modestes auberges, qui se produisaient dans de petits théâtres et qui ne se rendaient pas compte qu’ils faisaient tout ça parce qu’ils s’aimaient. C’est ce qui m’a poussé à écrire ce film : c’est une histoire d’amour fraternel entre deux hommes ». Pour montrer le « vrai » visage du duo derrière la légende, Jon S. Baird s’appuie sur un couple de choc : Steve Coogan et John C. Reilly qui a subi quatre heures de maquillage pour se glisser dans la peau de Hardy, plutôt enveloppé et à l’imposante silhouette.

Ce film vient fort à propos nous faire souvenir que le duo fut un des plus célèbres de tous les temps : de 1927 à 1950, ils se sont produits dans 107 films, ont connu un succès égal durant le Muet que le Parlant – ce qui ne fut pas le cas d’un Buster Keaton, malgré son génie – et surtout ont touché le public du monde entier : s’ils sont « Dick Und Doof » en Allemagne, ils devinrent « O Gordo e o Magro » au Brésil.

Les fous du duo plongeront alors avec plaisir dans la solide biographie signée Roland Lacourbe : Laurel et Hardy – la véritable histoire (*).  Il revient par le menu sur le parcours de Arthur Stanley Jefferson, dit Stan Laurel (1890-1965) et de Oliver Norvell Hardy (1892-1957). On y découvre deux personnalités aussi différentes que complémentaires. D’un côté,  Laurel, amateur de sports violents, virtuose de la pêche au gros et hommes à femmes fut le véritable cerveau du duo, dénichant les histoires les plus invraisemblables, passant des heures à peaufiner un gag, une séquence… De l’autre, Hardy, amateur de cours, de jazz et grand joueur de golf, un tendre aussi…

Au fil des pages, on retrouve bien des aspects de la vie privée et artistique du duo. Ainsi, Laurel fit ses débuts en travaillant avec un autre « débutant » : Charlie Chaplin qui pourtant, une fois le succès venu,  ne citera « pas une seule fois » le nom de son compagnon de tournée dans son autobiographie.

Perfectionniste jusqu’au bout des ongles, Laurel savait utiliser le caractère bouillant et la passion du golf de Hardy pour obtenir les meilleurs effets… en retardant au maximum certaines prises de vue pour la fin de la journée, ce qui provoquait l’exaspération de Hardy qui attendait sa partie de golf ! Et l’auteur d’écrire : « De cette façon certains regards d’exaspération d’Ollie ont atteint une authenticité incomparable : ce sont vraiment des regards d’exaspération. »

À la mort de son partenaire et complice, Laurel déclara : « Nous nous comprenions l’un l’autre. Curieusement, nous n’avons jamais eu le temps de vraiment nous connaître, avant que nous ne partions en tournée ensemble. Lorsque nous faisions des films, c’était surtout un travail, même si nous nous amusions beaucoup.  »

Le succès du couple comique est à son comble quand ils font une tournée européenne, au début des années 40, comme le raconte les scènes de liesse et l’accueil de chefs d’état – à Paris notamment – que reçurent Laurel et Hardy. Ils furent même reçus par le pape Pie XII lors d’une audience.

Pour les amateurs d’anecdotes, le présent volume rappelle aussi que ces compagnons du rire travaillèrent aussi séparément. Ainsi Oliver Hardy affronta, seul, un géant d’Hollywood dans Le Bagarreur du Kentucky : John Wayne.

Bourré d’informations, apportant des analyses précieuses sur l’évolution des techniques comiques du duo, ce livre est une somme passionnante sur ces deux tempéraments opposés. Le complément idéal du film retraçant une page oubliée de leur carrière et une tournée qui cette fois, sera « leur chant du cygne« .

(*) Ed. de l’Archipel

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