RIRE DANS LE SPLEEN AMBIANT ?

Vu à la Une du Parisien ce jour « Cinéma- Dieu qu’il est bon de rire !« . On ne s’en doutait pas. Plus sérieusement, ce titre est peut-être révélateur de l’état d’esprit des Français. Ce  cirque médiatique ne devrait pas non plus faire oublier ces temps difficiles.

3,6 millions de spectateurs en deux semaines, la comédie Qu’est ce qu’on a encore fait au Bon Dieu ? semble bien partie pour marquer l’histoire du genre au cinéma et pour grimper au sommet du box-office. L’histoire qui voit Claude Verneuil (Christian Clavier), le prototype du français étroit du bulbe, assister au mariage de chacune de ses quatre filles avec quatre mecs issus de communautés différentes (un Chinois, un juif, un Arabe et un Noir) a marqué les écrans. D’aucuns tablent même sur une fin de carrière à près de 8 millions d’entrées. Et certains médias d’en faire leur gros titre.

Que nos concitoyens aient envie de rire, cela se comprend. Que le mois de janvier soit favorable, météo oblige,  au retour en salle, on a l’habitude. Que l’Académie des Césars ait intégré un vote public (donc basé sur les entrées) pour récompenser un film est bien partie pour devenir le César du rire, décerné à des scénarios parfois (souvent) boudés par la critique. Qu’en ces temps de repli sur les communautés, voire de racisme ambiant, cette ode à la sociabilité soit la bienvenue, on s’en félicite… Mais cet engouement public et médiatique doivent susciter la réflexion.

Car, le rire ne doit pas être un alibi. Aller au cinéma pour « se changer les idées » est une idée certes partagée par beaucoup de gens, mais reste un brin réducteur. Et très facile à utiliser à une époque où favoriser les jeux du rire permet d’échapper au cirque politique et détourner l’attention des gens.

Charlot faisait certes rire mais pas que… Tourner Le Dictateur représentait une dose certaine de courage créatif. On peut déplorer que dans les derniers cartons comiques au cinéma, le rire qui secoue le cocotier, qui provoque vraiment,  soit assez rare. Il suffit pour s’en convaincre de mesurer la distance entre Les Aventures de Rabbi Jacob et le film dont il est question aujourd’hui. Même si certains l’affirment, Christian Clavier n’est pas Louis de Funès, loin de là.

Et l’on verra vite si, derrière les titres vantant ce « portrait d’une France plurielle », les mentalités ont évolué dans le bon sens ou si, malgré le rire (ou caché derrière lui), les idées xénophobes galopent encore et encore. Et là, il ne serait plus question de pouffer, mais de s’inquiéter.

Humour à suivre, donc…

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