ART, ARGENTINE ET POLAR

UN COUP DE MAÎTRE, de Gastón Duprat – 1h51

Avec Guillermo Francella, Luis Brandoni, Raúl Arévalo

Sortie : mercredi 6 février 2019

Mon avis : 4 sur 5

Le pitch ?

Arturo est le propriétaire d’une galerie d’art à Buenos Aires; un homme charmant, sophistiqué mais, sans scrupules. Il représente Renzo, un peintre loufoque et torturé qui traverse une petite baisse de régime. Leur relation est faite d’amour et de haine. Un jour, Renzo est victime d’un accident et perd la mémoire. Profitant de cette situation, Arturo élabore un plan osé pour les faire revenir sur le devant de la scène artistique.

2 raisons d’aller voir ce film ?

Une polar argentin sur fond de marché de l’art. Porté par deux acteurs magnifiques – l’un aussi élégant et roublard que l’autre est un vieux misanthrope bougon – Un coup de maître est une réjouissante histoire sur le monde de l’art contemporain et sur les succès qui peuvent être construit du jour au lendemain sur de belles impostures.

Avec, au cœur du récit aussi une belle description de l’amitié entre le vendeur et son vieil ami artiste.  Commentaires de Gastón Duprat : « Le film parle de l’imposture dans le monde de l’art, aussi de l’amitié qui lie les personnages interprétés par Guillermo Francella et Luis Brandoni. » Le cinéaste montre bien comment il suffit d’une mort pour que le marché s’enflamme et comment une grande galeriste peut « attaquer » le marché mondial pour faire une culbute financière. À cet égard, la séquence dans le musée de Rio de Janeiro avec le cheik qui veut acheter toute la collection en dit plus long qu’une longue enquête. Il ajoute : « Cela s’applique à certains arts où la mort de l’artiste multiplie par dix la valeur de son travail. Je ne pense pas que cela s’appliquer aux réalisateurs, scénaristes ou acteurs. »

Une réflexion sur la société mondialisée. Il s’agit aussi dans ce film – qui défend des valeurs éternelles, celle de l’amitié en premier chef – de montrer la manière dont les apparences jouent beaucoup dans les sociétés libérales. La séquence bourrée d’un humour grinçant du restaurant où Renzo part sans payer montre en est un exemple. Tout comme celle où le PDG d’une grande société dévoile une œuvre du peintre qu’il avait achetée sans voir, sans doute pour vanter médiatiquement ses qualités de mécènes : il faut voir sa tête quand il découvre le dernier coup de pinceau donné par Renzo avant de l’emballer.

Par un montage habile d’un flashback – qui donne un suspense certain à son film – et de retour dans le présent, Gastón Duprat parvient à mettre les codes du polar au service d’une vision ironique de la société argentine. On sait que Guillermo Francella est un assassin mais on se demande tout au long du film quand il va passer à l’acte et ce choix est extrêmement habile.

Se concluant dans les paysages absolument majestueux et sauvage de la région de Jujuy, cette comédie noire est un petit régal de finesse, tout en offrant une histoire originale sur le petit monde de l’art contemporain et ses modes.

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