KORE-EDA, L’ESPRIT DE FAMILLE

Palme d’or au dernier Festival de Cannes, Une histoire de famille, de Kore-eda sort le 12 décembre. Une histoire où l’on retrouve un thème cher au cinéaste japonais : celui de la famille.

Le dernier Kore-eda est une chronique de famille douce-amère. L’histoire est simple : au retour d’une nouvelle expédition de vol à l’étalage, Osamu et son fils recueillent dans la rue une petite fille qui semble livrée à elle-même. D’abord réticente à l’idée d’abriter l’enfant pour la nuit, la femme d’Osamu accepte de s’occuper d’elle lorsqu‘elle comprend que ses parents la maltraitent. En dépit de sa pauvreté, survivant de petites rapines qui complètent leurs maigres salaires, cette famille semble vivre heureuse  jusqu’à ce qu’un incident révèle un lourd secret…

L’idée du film est notamment venue à Kore-eda en attendant parler d’une parler de familles touchant illégalement la pension de retraite de leurs parents morts depuis longtemps. Il souligne : « La première chose qui me soit venue en tête a été cette phrase : « Seul le crime nous a réunis ». Au Japon, les fraudes à l’assurance-retraite et les parents qui obligent leurs enfants à voler sont sévèrement fustigés. Bien entendu, il est légitime de vilipender les auteurs de tels actes, mais je me demande pourquoi on se met en colère pour des délits aussi insignifiants alors qu’il y a des milliers de criminels qui commettent des actes beaucoup plus graves en toute impunité. Depuis le tremblement de terre de 2011, je m’interroge sur ceux qui répètent sans cesse que les liens familiaux sont importants. Et j’ai donc eu envie d’explorer la nature de ces rapports en m’intéressant à une famille liée par des délits. »



Le film est aussi une occasion pour le cinéaste japonais d’évoquer une fois encore la question des liens familiaux, sans sombrer pour autant dans le pathos ou le sentimentalisme. Dans les colonnes du Journal du dimanche, Kore-eda souligne : « Le Japon est une société très conservatrice quant au schéma de la famille : les liens de sang prévalent surtout. Parce qu’on estime toujours que c’est aux enfants de s’occuper de leurs parents âgés. Il est inconcevable de les placer dans des institutions. de la même manière, les mamans hésitent à faire appel à des baby-sitters, car c’est considéré comme une marque d’abandon. » Un respect de la tradition aujourd’hui rendue plus périlleuse encore car la jeune génération n’a plus toujours les moyens d’entretenir les ancêtres.

Signe que le propos de Kore-eda peut prêter à polémique dans son pays, le gouvernement japonais n’a pas vraiment commenté la Palme d’or, prestigieuse récompense s’il en est, reçue par le cinéaste au dernier Festival de Cannes. Il est vrai, à l’heure de la mondialisation, le Japon n’est pas isolé de la situation mondiale. Commentaires de Kore-eda : « Autrefois au Japon, la classe moyenne était très importante et aujourd’hui, elle se délite. Ce n’est pas une situation propre au Japon : le fossé se creuse entre les très riches et les très pauvres qui ont du mal à subsister en dépit du fait qu’ils travaillent. Parfois, ils peuvent toucher plus en allocations qu’en travaillant… »

 

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