LE VOYAGE DU LÉPREUX

YOMEDDINE, de A.B. Shawky – 1h37

avec Rady Gamal et Ahmed Adbelhafiz

Sortie : mercredi 21 novembre 2018

Mon avis : 3 sur 5

Le pitch ?

Beshay, lépreux aujourd’hui guéri, n’avait jamais quitté depuis l’enfance sa léproserie, dans le désert égyptien. Après la disparition de son épouse, il décide pour la première fois de partir à la recherche de ses racines, ses pauvres possessions entassées sur une charrette tirée par son âne. Vite rejoint par un orphelin nubien qu’il a pris sous son aile, il va traverser l’Égypte et affronter ainsi le Monde avec ses maux et ses instants de grâce dans la quête d’une famille, d’un foyer, d’un peu d’humanité…

Ce qui touche dans ce film ?

Franchement, on peut éprouver quelques réticences à la perspective de suivre les errances égyptiennes de ce chiffonnier à la recherche de sa famille. Et pourtant, A.B. Shawky parvient à nous concerner en plaçant sa caméra au plus près de son « héros ». Il explique comment il a opté pour Rady Gamal pour jouer son personnage principal : « Le choix de confier le rôle de Beshay à un non-acteur lépreux est venu de la volonté de donner au personnage, tout comme à l’homme, la possibilité d’être défini par son humanité et non par sa maladie. L’idée est de ne pas détourner le regard des exclus que l’on croise dans le film et de voir au-delà de leur apparence pour se concentrer sur leur personnage. »

Le pari est réussi tant Rady Gamal irradie d’une vraie humanité et tisse avec son jeune compagnon de route des relations paternelles d’une grande force. De même, dans la séquence sous les ponts d’autoroute, la rencontre avec les autres mendiants offre des moments de grande humanité à travers des dialogues touchants et qui sonnent juste. Le cinéaste poursuit : « Rady est quelqu’un qui ne s’apitoie jamais sur son sort, et je voulais que le film soit à son image. Je ne voulais pas d’un film doloriste, pesant, je voulais un « feel good movie ». Même dans la scène de l’enterrement de son épouse, folle, se dégage une grande humanité et une forme d’apaisement tant les -rares – proches entourent avec une vraie sérénité Beshay.

Paradoxalement, par la mise en scène légère, les images signées Federico Cesca, Yomeddine parvient, sur un tel sujet, à livrer un message plein d’optimisme, même s’il peut sembler un peu naïf. Avec notamment la belle séquence finale où le voyage de retour en locomotive symbolise une vraie sérénité à l’instant où le réalisateur capte le sourire du mendiant.

C’est aussi une des forces de ce film original  que de proposer une découverte d’un autre visage de l’ Égypte, oublié du tourisme de masse. Commentaires du cinéaste de passage au dernier Festival de Cannes : « On voit un autre côté de mon pays. On n’entre presque jamais au Caire. Mon pays est magnifique, il y a plein de choses qu’on ne montre jamais, a souligné le réalisateur A.B. Shawky. Il y a une séquence dans les pyramides, mais ce ne sont pas les pyramides que l’on voit d’habitude. Montrer une autre image de l’Egypte. » Et on ne peut qu’être étonné de la manière dont A.B. Shawky est parvenu à diriger et à faire jouer les deux comédiens principaux qui sont analphabètes et donc novices sur un plateau de tournage.

En tout cas, une telle histoire ne peut laisser indifférent.

 

 

 

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