SOFIA, de Meryem Bemm’Barek – 1h20
Avec Maha Alemi, Lubna Azabal, Faouzi Bensaïdi
Sortie : mercredi 5 septembre 2018
Mon avis : 4 sur 5
Le pitch ?
Sofia, 20 ans, vit avec ses parents à Casablanca. Suite à un déni de grossesse, elle se retrouve dans l’illégalité en accouchant d’un bébé hors mariage. L’hôpital lui laisse 24h pour fournir les papiers du père de l’enfant avant d’alerter les autorités…
3 raisons d’y aller ?
Un drame de la vie quotidienne. Dans une mise en scène rapide et efficace, la réalisatrice
marocaine Meryem Bemm’Barek raconte dans son premier long métrage une histoire simple pour aborder un sujet très sensible dans son pays : l’interdiction des relations sexuelles hors mariage, la fracture entre riches et pauvres, les relations économico-politiques avec les colons d’hier… La cinéaste souligne : « Ces histoires sont assez communes au Maroc où les relations sexuelles hors mariage sont interdites par la loi. Tout le monde là-bas a déjà entendu parler de près ou de loin d’un déni de grossesse ou d’un enfant né sans que ses parents ne soient mariés. C’est une situation forcément compliquée car la mère comme le père sont susceptibles d’être poursuivis par la justice et d’écoper d’une peine de prison. Du coup, le mariage est la seule issue possible. »
Le mariage incontournable. Seule manière d’afficher sa position sociale, le mariage est, au Maroc, un symbole de la réussite sociale et il convient de s’afficher avec le plus de clinquant possible. Même si, derrière les apparences, la réalité est tout autre car le jeune marié, Omar, est victime, lui-aussi d’un enchaînement de circonstances car on découvre habilement au cours du film qu’il n’est pas le coupable idéal. Mais là encore, il faut sauver les apparences. A cet égard, la séquence du mariage civil vaut tous les grands discours. La cinéaste ajoute : « C’est un portrait du pays aujourd’hui. Je ne voulais pas faire un film qui parle seulement de la condition de la femme. Celle-ci est toujours montrée comme la victime d’une société patriarcale, or je ne crois pas que l’on puisse parler de la condition féminine sans parler de la société elle-même. La place des femmes se définit en fonction d’un contexte socio-économique. »
La solide distribution. En jeune fille perdue et boudeuse, Maha Alemi est tout à fait bouleversante dans le rôle : elle promène un regard fuyant sur ce monde qui la contraint à sauver les apparences pour permettre à sa famille de vaincre les rumeurs et les ragots. Dans un rôle inhabituel, Lubna Azabal joue cette tante bourgeoise qui sait utiliser ses moyens pour amadouer les autorités policières dans un pays où la corruption règne en maître. Quant à Sarah Perles, elle joue très justement cette jeune fille entre deux cultures qui symbolise le regard un brin condescendant porté par l’Occident sur ces us et coutumes.
Prix du scénario dans la sélection Un certain regard au dernier Festival de Cannes, Sofia est un premier film de belle facture, touchant et intelligemment engagé.

