LA SAISON DU DIABLE, de Lav Diaz, 3h54
Avec Piolo Pascual, Shaina Magdayao, Pinky Amador
Sortie : mercredi 25 juillet 2018
Mon avis : 4 sur 5
Le pitch ?
1979. Au plus fort de la loi martiale instaurée par le président Marcos, quelques villageois rebelles tentent de résister …
3 raisons d’y aller ?
Une comédie musicale politique inattendue. Pour dénoncer les méfaits du régime de sinistre mémoire du président philippin Marcos, Lav Diaz a eu une idée de génie mais risquée : faire une « comédie musicale » politique où l’essentiel des dialogues est chanté. Déroutant au
début, le procédé est assez efficace sur la longueur et elle est conséquente : près de 4 heures !! Commentaires du cinéaste : « J‘étais vraiment intéressé par les chansons et leur utilisation. En fait, tout a commencé pendant l’écriture du scénario de mon film de gangster, durant lequel j’ai soudain commencé à écrire des chansons. Plus j’étais confronté indirectement à ce qui se passait dans mon pays, plus cela a nourri les chansons. C’était mon deuil, j’écrivais des marches funèbres pour mon pays. »
En prime, le fait que les chansons soient sans instrumentation et jouent sur la répétition, comme des psaumes religieux, donnent une teneur particulière aux prestations des comédiens.
Un héros symbolique. En mettant au cœur de cette période de répression, le personnage d’Hugo Haniway, il permet d’en faire le symbole de tous les persécutés du régime dictatorial
de Marcos. « Il incarne à mes yeux plusieurs Philippins : des poètes, des professeurs, des activistes. Tous sont des survivants qui ont été victimes du régime de Marcos. J’ai grandi durant cette période, j’ai été témoin de ce chapitre de l’Histoire. Beaucoup de poètes que je connais m’ont servi d’inspiration. » Par ailleurs, il est entouré de comédiens assez étonnants, notamment cette actrice qui joue le chef de la police psychotique et sadique. Et dont l’allure est un rien androgyne.
Une mise en scène brillante. On peut trouver parfois le temps long dans ce film au déroulé d’une grande lenteur, mais on ne peut rester insensible à la réalisation absolument magnifique avec une utilisation bluffante du noir et blanc qui confère à cet opus une atmosphère surréaliste en diable. Sans parler de l’utilisation systématique d’un très grand objectif de 9.8. qui donne un énorme premier plan et rend l’arrière-plan nettement plus petit. Et, à cet égard, ce drame est d’une grande force visuelle avec les images poétiques en diable, voulues par Larry Manda.
Un drame politique mais dont le traitement visuel aussi bien que sonore est tout à fait étonnant et original.

