Conçu à deux voix avec la romancière Véronique Olmi, Une force et une consolation (*) témoigne de la passion de lire d’Ariane Ascaride. Où la comédienne montre comment la lecture a structuré sa personnalité.
Comme le dit fort justement Véronique Olmi dans son invitation au voyage d’Une force et une consolation, Ariane Ascaride est une « sauvée par la littérature« . À découvrir leur conversation, on s’aperçoit à quel point la jeune fille s’est évadée dans la lecture durant sa jeunesse marseillaise où elle n’avait pas de chambre à elle pour se construire un petit monde et où elle était plutôt solitaire. « Ma famille,
bien que communiste, n’était pas politiquement très orthodoxe. On ne lisait pas que de la littérature progressiste. Ce n’était pas une famille d’intellectuels, il n’y avait pas de rapport réfléchi à la littérature, on achetait des illustrés pour les enfants comme on allait acheter le journal. »
Mais, dès lors qu’elle sait lire – très vite – la petite Ariane plonge avec avidité dans la lecture, en se laissant porter par ses émotions. Confidences : « Je supporte très mal, encore maintenant, qu’on attaque un livre que j’ai aimé. C’est comme si on m’attaquait, moi. À partir du moment où je lis quelque chose que j’aime, ça fait partie de mon monde, et si tu n’aimes pas mon monde… Je sais que tu en as le droit, mais pour l’accepter, il faut vraiment que je fasse un effort. Mon rapport à la lecture, ou même mon rapport au théâtre ou au cinéma, est d’abord affectif. Pas intellectuel. Ce qui compte, c’est que ça provoque chez moi. »
Avant le cinéma et le théâtre bien sûr, on mesure combien la littérature a permis à la comédienne à « supporter le réel. » Et comment les livres restent aujourd’hui un refuge avec des titres qu‘elle se plait à relire pour en dénicher de nouvelles pépites, comme Madame Bovary, de Flaubert. Ce qui justifie aussi son goût pour les vieux livres, les vieilles éditions, mais ce n’est pas par goût de la collection. Autres confidences : « Quand tu rentres dans un théâtre, ça respire. Un vieux livre aussi, ça respire ; il respire les gens qui ont tourné ses pages, les gens qui ont pleuré sur ses pages, qui ont ri, qui ont posé le livre dans un endroit où ça sentait peut-être un parfum, ou dans une pièce… »
Évoquant aussi bien Balzac que Joyce Carol Oates, Carson McCullers ou encore Anna Seghers dans ces conversations – aussi bien que des metteurs en scène qui ont marqué son parcours, tel Marcel Bluwal et Antoine Vitez- Ariane Ascaride s’avère au final comme une lectrice invétérée pour laquelle une vie sans livre serait une existence sans âme. « J’aimerais tant que beaucoup de gens aient ce rapport à la littérature, ce temps qui t’oblige à la patience, prendre le temps de lire, c’est aussi prendre un temps dans ta vie, alors que nous vivons dans l’immédiateté. » Après le droit à la paresse, ne devrait-on pas militer alors pour le droit à la lecture en se déconnectant de la violence numérique ?
(*) Ed. de l’Observatoire
LIRE POUR LES AUTRES
Dans cette conversation, Ariane Ascaride parle aussi de son plaisir de faire la lecture à haute voix des textes : « Les lectures me plaisent simplement parce que je voudrais arriver à faire passer aux gens ces émotions extraordinaires, être juste une interprète, passer d’une langue à l’autre pour simplement faire entendre. » Alors, on l’écoute :
