L’année dernière Petit Paysan avait évoqué les difficultés de vivre des agriculteurs français. Sur le ton de la comédie, Philippe Le Guay revient sur ce thème dans Normandie nue, sur les écrans le 10 janvier.
L’histoire se passe dans un petit village de la Sarthe où les paysans ont bien du mal à faire entendre leur colère. Le passage d’un photographe américain, Blake Newman,qui veut immortaliser la beauté de cette campagne, va donner des idées au maire Georges Balbuzard (François Cluzet), pour sauver son village : déshabiller les habitants pour une photo qui pourrait sauver son village. Mais aucun des paroissiens n’est d’accord pour se mettre à nu…
Pour nourrir son scénario, Philippe Le Guay a passé quatre ans à se plonger dans l’univers en crise des paysans. Commentaires : « J’ai rencontré tout un monde : les paysans traditionnels, les partisans du bio, les modérés, ceux qui vendent directement aux consommateurs par des systèmes de coopératives… Cette immersion m’a permis de comprendre leurs difficultés et leurs souffrances, économiques bien sûr, mais aussi morales. Dans le film, les personnages ne parlent pas d’une seule voix. Mais tous ont en commun d’être désespérés : ils se sentent seuls, humiliés, avec le sentiment de n’être ni regardés ni écoutés. C’est cette réalité émotionnelle que j’ai voulu restituer… »
Tout en montrant la difficulté de vivre des ruraux, le cinéaste ironise aussi sur le retour à la nature de
certains citadins. On savait depuis Les Femmes du 6e étage que Philippe Le Guay avait un talent pour réunit un casting solide et le faire fonctionner. On retrouve dans cette comédie le même cocktail heureux avec des personnalités aussi différentes que François Cluzet, François-Xavier Demaison et Grégory Gadebois.
Pour la fameuse photo de nu, Philippe Le Guay a dû composer avec la pudeur des paysans. Conclusion du cinéaste : « Ce qui est étrange, c’est qu’à la campagne, la nudité n’existe pas. C’est comme si les paysans n’étaient jamais nus. Le corps reste caché. A un moment du film, Balbuzard dit que, « même en été, le Normand garde son pull », et c’est vrai, on voit rarement les paysans autrement qu’en
bottes et en pantalon. Au Mêle sur Sarthe, la mairie a aménagé un lac artificiel, les éleveurs ne vont jamais s’y baigner ! Alors qu’en ville, le corps est exploré sous toutes les coutures, érotisé et banalisé via la publicité. A la campagne, il reste un tabou. Cela ne veut pas dire que les paysans soient prudes ou puritains ; mais leur corps reste un bastion. »
Malgré certaines réticences, il est parvenu à ses fins mais, pour la petite histoire, ce ne fut pas la dernière séquence du film par crainte des caprices de la météo. Et il a visité une dizaine de champs avec d’opter pour celui de l’histoire car il était bien exposé au soleil et avec un « grand tilleul magnifique, un élément vertical et un élément horizontal, ainsi qu’un monticule pour que les personnages puissent se déployer ».
