LE LION EST MORT CE SOIR, de Nobuhiro Suwa – 1h33
Avec Jean-Pierre Léaud et Pauline Etienne
Sortie : mercredi 3 janvier 2017
À mon avis : 3 sur 5
Le pitch ?
Sud de la France, de nos jours. Jean, un acteur rattrapé par le passé, apprend que le tournage sur lequel il joue est suspendu pour un temps indéfini. Il profite de cette occasion pour rendre visite à une ancienne amie et s’installe, clandestinement, dans une maison abandonnée où vécut jadis Juliette, le grand amour de sa vie. Une bande d’enfants du quartier, apprentis cinéastes, découvre la même demeure, décor parfait de leur prochain film d’horreur artisanal. Jean et les enfants tomberont nez à nez, tôt ou tard…
2 raisons d’y aller
Un regard sur le temps qui passe. Venu du documentaire, Nobuhiro Suwa a déjà marqué le cinéma d’opus original (M/Other, H Story). Cette fois, il a eu l’idée du film en croisant Jean-Pierre Léaud au Festival de La Roche-sur-Yon. Il raconte : « Quand je l’ai vu, j’ai senti une puissante poésie cinématographique dans sa présence, dans sa façon d’être et de parler, ce qui m’a donné une forte envie de le filmer. A ce moment là, on a juste évoqué vaguement l’idée de faire un film ensemble, mais rien n’était précis. Le point de départ, c’était le désir de capturer sa présence avec une caméra. » Il le filme donc dans ce récit qui mélange le réel et le fantastique avec les « aventures » d’un vieil homme qui revit une grande passion passée dans une belle demeure abandonnée du sud de la France et qui dit, en forme de maxime de vie : « Il faut marcher toute sa vie, la main dans la main avec la mort. »
Avec une mise en scène en apparence décousue mais d’une douce fluidité, dans des cadres solaires qui contrastent avec la mélancolie de l’histoire et lui offre un écrin parfait, le cinéaste signe ici une jolie réflexion sur le temps qui passe, mais non dénué d’humour comme dans la séquence où le comédien feint de jouer avec les directives des metteurs en scène en herbe.
Un hymne à Léaud. Le choix de la célèbre chanson d’Henri Salvador pour donner son titre au film a été inspiré une fois encore au réalisateur par Jean-Pierre Léaud. « Bien avant le tournage, quand il est venu au Japon pour la première fois, nous nous sommes vus à Kyoto. Je lui ai demandé s’il avait une chanson qui lui plaisait bien. Il a entonné la chanson du Lion est mort ce soir. Sa façon très originale de l’interpréter m’a beaucoup plu. J’ai aussi aimé le titre. J’ai eu l’impression que c’était en harmonie avec mon projet, ou plutôt, j’ai senti que ce serait un bon point de départ » raconte Nobuhiro Suwa.
Et l’immortel interprète d’Antoine Doinel, personnage fétiche de Truffaut, est à sa juste place avec sa silhouette qui chancèle parfois, dans cette rencontre entre un vieux comédien et ses enfants gagnés par l’envie de tourner un film. Maladroit jusque dans la diction travaillée, Jean-Pierre Léaud symbolise alors comme une passation de flambeau entre deux générations pour signifier que le cinéma est plus fort que la mort. Et qui se moque des décennies qui passent même si la dernière heure le tuera…
Avec l’apparition douce et mystérieuse de Pauline Étienne, et la gaieté de ces enfants délurés, ce film poétique ne peut qu’attirer la curiosité des amoureux du cinéma.

