DE TOUTES MES FORCES, de Chad Chenouga – 1h38
avec Khaled Alouach, Yolande Moreau
Sortie : mercredi 3 mai 2017
Je vote : 4 sur 5
Le pitch ?
Nassim est en première dans un grand lycée parisien et semble aussi insouciant que ses copains. Personne ne se doute qu’en réalité, il vient de perdre sa mère et rentre chaque soir dans un foyer. Malgré la bienveillance de la directrice, il refuse d’être assimilé aux jeunes de ce centre. Tel un funambule, Nassim navigue entre ses deux vies, qui ne doivent à aucun prix se rencontrer…
Pourquoi ce film est très touchant ?
Déjà dans 17, rue Bleue, Chad Chenouga revenait sur son enfance comme pour l’exorciser. Cette fois, il pourrait s’agir d’une suite avec le parcours de Nassim qui, à la mort de sa mère toxicomane, se retrouve envoyé dans un foyer et est déboussolé du jour au lendemain, commence à mentir à ses plus proches amis pour faire croire qu’il mène une vie différente. Mais, Chad Chenouga tient à préciser : « Ce film n’est pas la suite de 17, rue Bleue et ce n’est pas un film d’époque. C’est une fiction co-écrite avec Christine Paillard, qui s’est nourrie des ateliers d’improvisation que j’ai faits avec des jeunes vivant en foyer, puis avec les acteurs pressentis pour le film. J’ai connu une trajectoire comparable à celle du héros, Nassim. »
De séquence en séquence, sans jamais tomber dans la moindre caricature, il montre le chemin de croix de ce jeune homme qui doit passer de l’environnement privilégié d’un bon lycée parisien où il fréquente la bourgeoisie classique à la misère d’un foyer pour des laissés-pour-compte qui ont l’agressivité verbale pour quotidien.
Entre le réveillon de Noël dans ce cadre triste, les relations sexuelles d’un soir, les tensions entre les membres du foyer, la caméra nous fait vivre le quotidien d’un Nassim complètement perdu, sauf quand il travaille avec une étudiante studieuse (Jisca Kalvanda, découverte dans Divines) ou quand il parvient à nouer une relation plus sereine avec la directrice bienveillante du foyer, admirablement campée par une Yolande Moreau dont le regard déborde de tendresse. « En commençant à travailler sur le scénario, Christine et moi voulions que le film débute avec l’arrivée de Nassim dans le foyer et s’achève avec son départ ; je voulais raconter un parcours initiatique, un moment dans la vie tourmentée d’un adolescent pas comme les autres… Comment cette année de foyer allait le changer, lui permettre de grandir » poursuit Chad Chenouga.
Entre instants fugaces de violence et moments plus fraternels, ce film ne verse dans aucuns clichés et évoque le lent travail d’un deuil impossible avec une grande finesse. Pour Nassim, le dernier message téléphonique de sa mère devient ainsi comme une drogue nécessaire mais qui ne fait qu’ouvrir à chaque fois une blessure profonde.
On est bluffé par la prestation de Khaled Alouach qui se tire des moments les plus difficiles à jouer sans surjouer, ni perdre de sa fraîcheur. Un film qui a été triplement remarqué au récent Festival 2 Valenciennes où il a reçu trois prix : celui de la Critique, celui des Etudiants et enfin le prix de la Meilleure Interprétation masculine pour ce jeune acteur si prometteur.
