DES FEMMES ET LE ZONZON

DE SAS EN SAS, de Rachida Brakni – 1H22

Avec Samira Brahmia, Zita Hanrot, Fabienne Babe

Sortie : mercredi 22 février 2017

Je vote : 4 sur 5

sas-en-sas-229Le pitch ?

En une brûlante journée d’été 2013, Fatma et sa fille Nora prennent la route pour la prison de Fleury-Mérogis. Sur le parking, une petite foule de visiteurs attend déjà. La porte de l’établissement s’ouvre. Une première porte, un premier sas, un premier couloir… C’est le début d’un trajet infernal jusqu’au parloir, mené par un petit groupe d’individus composites.

Un premier film qui étonne…

sas-en-sas-21Connue pour ses talents d’actrice, Rachida Brakni a décidé de passer derrière la caméra après avoir découvert l’univers carcéral en rendant visite à  un proche dans la célèbre prison de Fleury-Mérogis. Elle témoigne : « Ce qui m’a frappé d’emblée, c’est l’absence d’hommes parmi les visiteurs dans une prison d’hommes. Pourquoi les pères et les frères ne viennent-ils pas ? Par ailleurs, j’ai découvert que la prison demeure un des derniers lieux emblématiques de la République : la mixité sociale et culturelle qu’on y trouve est sans équivalent avec ce que sont devenus l’école et l’hôpital. Des femmes issues de milieux que tout oppose et qui ne se seraient jamais côtoyées ailleurs finissent pas se rapprocher et développer une solidarité. »

Rachida Brakni se tire avec les honneurs d’un exercice de style difficile : filmer les relations entre femmes qui, sur le papier, ont peu de choses en commun dans un tel univers de huit clos et au décor très impersonnel. Comme elle sait filmer sans que le temps ne paraisse s’étirer une si longue attente dans une chaleur étouffante qu’elle parvient à nous faire ressentir par de petites touches. Elle montre aussi clairement le parcours banal de ces femmes qui doivent faire avec les règles administratives pour rendre visite à un proche, condamné à la prison.
Il aurait été  aussi facile de caricaturer les matons. La réalisatrice parvient à exprimer une certaine nuance en montrant plusieurs types, plusieurs caractères : du vieux briscard au jeune gardien qui découvre un univers en vase clos où toutes les tensions s’exacerbent. La réalisatrice raconte : « Quand j’ai commencé à travailler sur le scénario, je suis allée en rencontrer plusieurs et j’ai compris que les gardiens étaient eux aussi des personnes enfermées, en proie à la même violence que celle qui touche les prisonniers. »

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Enfin, il y a le choix de comédiennes qui unissent leur talent pour rendre l’histoire des plus crédibles. Que ce soit Zita Hanrot, à la sensibilité à fleur de peau, Meriem Serbah, qui joue la provocante ou encore Fabienne Babe, une bourgeoise type qui découvre, effarée, les coulisses du monde carcéral et ses codes. Conclusion de Rachida Brakni : « Même s’il y a un peu de moi dans chacun des personnages féminins, je les ai toutes choisies pour ce qu’elles étaient. A l’écran, vous les voyez telles qu’elles sont, elles ont été ma matière brute pour faire évoluer les personnages. »

Il y a une belle sensibilité derrière cette plongée dans l’antichambre d’une taule, et ce sas dont on ne ressort pas indifférent.

 

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