DIVINES, de Houda Benyamina – 1h45
Avec Oulaya Amamra, Deborah Lukumuena, Kivin Mischel, Jisca Kalvanda
Sortie : mercredi 31 août 2016
Je vote : 4 sur 5
Le pitch ?
Dans un ghetto où se côtoient trafics et religion, Dounia a soif de pouvoir et de réussite. Soutenue par Maimouna, sa meilleure amie, elle décide de suivre les traces de Rebecca, une dealeuse respectée. Sa rencontre avec Djigui, un jeune danseur troublant de sensualité, va bouleverser son quotidien.
3 raisons d’y aller ?
Une plongée saisissante dans la banlieue. A l’heure où il est de bon ton de s’interroger,
dans le contexte des attentats, sur la vie de certaines zones périphériques, ce film pose, l’air de rien, toutes les questions essentielles sur la crise qui traverse la société française : économie parallèle, crise de l’éducation – la scène où Dounia pète un plomb dans son cours est parfaite – poids de la religion… Houda Benyamina raconte la genèse de son film : « Mon besoin de créer vient toujours d’un sentiment d’injustice. À l’origine du lm, il y a eu les émeutes de 2005, que j’ai vécue de l’intérieur. J’ai raisonné mes proches, mais j’avais moi aussi envie de sortir et de tout défoncer. Je me suis ensuite demandée pourquoi cette colère n’avait pas abouti à une véritable révolte. Au final, il n’y a pas eu de revendications, les jeunes ont brûlé des voitures en bas de chez eux et ne sont pas sortis du périmètre dans lequel ils étaient cantonnés, faute de la maîtrise du verbe, faute d’intelligentsia. Il y a dans l’histoire les fantômes de Zyed et Bouna, et des humiliés de notre société. Je ne dirais pas pour autant que « Divines » est un film de révolte. C’est un constat. »
Une réalisation nerveuse. Porté par une musique classique qui accompagne les variations des chorégraphes (Mozart, Vivaldi), la caméra de Houda Benyamina virevolte tout au long du récit. Tourbillonnante, elle se joue des ralentis, des formats différents, de l’IPhone au Cinémascope, pour nous embarquer dans une histoire où la violence du quotidien n’exclut pas un humour permanent, parfois ravageur. C’est particulièrement vrai dans l’histoire d’amour de Dounia et son danseur. Le tout porté par des dialogues qui sonnent en permanence juste avec des expressions qui vont rester comme celle de la dealeuse campée par Jisca Kalvanda et qui lance « Tas du clito, toi. »
La découverte de jeunes actrices. Avec ce film, on découvre trois jeunes actrices qui ont tout pour faire un long chemin : intensité de jeu, sens des dialogues et présence devant la caméra. Et, en premier chef, Oulaya Amamra qui « explose » à l’écran. Elle définit ainsi son personnage : « Dounia, elle, est en quête de dignité ! Elle a de la erté, elle veut pouvoir être reconnue pour ce qu’elle est, et elle veut sortir sa mère de la merde. »
S’inscrivant résolument dans le sillage de La Haine, ce film a reçu une Caméra d’or amplement méritée au dernier Festival de Cannes et il vaut mieux que la logorrhée que nous infligea alors sa réalisatrice, il est vrai émue. Une histoire qui, malgré le côté noir et des séquences très dures, a une vraie résonance humaniste.


