LA JEUNE FILLE ET … LA BOMBE

IMG_5863LE SOUFFLE, d’Alexander Kott

Avec Elena An, Karim Pakachakov, Narinman Bekbulatov-Areshev

Sortie : mercredi 10 juin 2015

Je vote 4 sur 5

Quezako  ?

Un homme et sa fille vivent paisiblement dans une ferme isolée des steppes kazakhes. Alors que deux garçons, un Moscovite et un Kazakh, se disputent le cœur de la jeune fille, une menace sourde se fait sentir…

Et alors ?

Dès le premier plan du film, on est surpris par le sens du cadrage d’Alexander Kott. Et jusqu’au bout de l’histoire, la réalisation tient ses promesses et on resent le passé de photographe du réalisateur russe, né à Moscou en 1973 et qui s’est tourné, à 21 ans, vers le cinéma après avoir obtenu le diplôme de l’Institut national russe de la cinématographie.  Avec ce troisième long métrage, il tente un sacré pari : raconter une histoire sans avoir recours au dialogue. Pari réussi tant le travail sur la bande son est abouti. Commentaires du réalisateur : « Tous les bruits ont été extrêmement travaillés et postsynchronisés en studio. Le bruit du vent, par exemple, est compliqué à rendre artificiellement : nous avons enregistré quantité de vents durant le tournage et nous nous sommes servis dans les bandes au moment du montage. Je voulais que la musique du film naisse du vent pour s’y fondre à nouveau à la fin du morceau. J’ai fait appel à Alexeï Aïgui, violoniste et formidable compositeur, qui se produit et travaille en France. Il a réussi à composer une musique d’une grande qualité artistique malgré nos contraintes économiques. »

IMG_5711Si le réalisateur a imaginé une étrange d’histoire d’amour sans paroles entre cette jeune paysanne – qui vit dans une ferme isolée de la steppe avec son père – et deux jeunes garçons, le thème n’est pas gratuit et permet au cinéaste d’évoquer par petites touches – l’irruption nocturne de soldats qui contrôlent son père sous une pluie battante; un horizon barré par des barbelés ou une colonne d’inquiétants véhicules militaires – une histoire longtemps tenue sous silence : celle des essais nucléaires que les autorités soviétiques ont faites, entre 1949 et 1989, au nord-est du Kazakhstan. 456 essais au total eurent lieu dans ces steppes qui ont subi un niveau d’irradiation comparable à celui de Tchernobyl mais pendant quarante ans ! Pour les militaires russes, c’était l’occasion de voir l’effet du souffle atomique sur champs, maisons et habitants.

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Au fil du récit, le décor splendide et désertique devient oppressant jusqu’au dénouement final avec un sens consommé d’un certain suspense.  Un film déroutant et splendide avec des séquences surréalistes à la Kusturica, notamment avec l’irruption de cette avion sans ailes. Comme s’il symbolisait une population rêvant à un ailleurs dans un monde promis à la dévastation nucléaire.

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