JEAN-CLAUDE DROUOT EN TOUTE LIBERTÉ

9782809816600-G-210x337Dans les années 60, il aurait pu choisir les paillettes et céder aux pièges de la médiatisation. Jean-Claude Drouot a préféré mener une vie d’artistes libre. Son livre de souvenirs, Le Cerisier du pirate, en apporte des preuves. Petite promenade entre les lignes d’un ouvrage où l’on passe de Vilar à Dali en passant par Kirk Douglas, Liz Taylor et Delphine Seyrig.

Le choc de « Thierry »

Pour les moins de 20 ans, Thierry la Fronde est sans doute le nom d’un feuilleton qui ne dit plus grand chose. Et pourtant, de 1963 à 1966, les aventures de ce rebelle ont enthousiasmé les spectateurs de l’unique chaîne de télévision Et fait de l’enfant de Belgique – il est né à 480013296_B974991534Z.1_20150311161009_000_GGU44QF84.1-0Lessines  en 1938 – une star du jour au lendemain. De ce héros, Jean-Claude Drouot écrit aujourd’hui qu’il lui rappelait ses jeux d’enfants et d’adolescents quand il préférait les Indiens au cow-boys. « Mon cœur penchait du côté des hommes libres, non vers celui des envahisseurs. Et Thierry, au fond, était lui-même une sorte d’Indien, un sauvage qui résistait à l’oppression obtuse, avec de faibles moyens, certes, mais en puisant sa fougueuse énergie dans la force de son esprit de justice. »

Le sens de la liberté

Passer de la télévision et ses paillettes à l’univers théâtral d’un Delteil  n’est pas faire montre d’un esprit de carrière. Ou d’avoir de la graine d’arriviste dans les veines. Confidences de l’artiste : « Il est vrai que j’aime monter à l’assaut, comme le capitaine Fracasse – ou comme Thierry la Fronde ! Mais mon ambition a toujours été cantonnée dans les limites de l’art et de la fiction. Je n’aime guère le terme de carrière. Si j’ai accepté les responsabilités qui se sont offertes, ce n’est JC-Drouot-portraitcertainement pas par stratégie politique. Reims, puis le Théâtre national de Belgique ont occupé presque dix ans de ma vie. Le conclusion de cette aventure est qu’au fond, je n’aime pas « l’Institution ». Elle n’est pas faite pour moi, et je ne suis pas fait pour elle. Je me réclame de deux pères non biologiques, Jean Vilar et Joseph Delteil. Ils m’ont fécondé ou rendu à moi-même.« 

Un artiste qui aime la recherche

Sans coup férir, Jean-Claude Drouot est passé des feuilletons télévisés grand public comme Les Gens de Mogador à des pièces qui firent parfois scandale, signées d’un Arrabal. Confidences  sur ses choix créatifs à la fin des années 60 quand il joua au côté de Delphine Seyrig en 1969 dans Le Jardin des délices, de l’auteur espagnol : «  A bien des égards, un comédie baroque se développait en moi. J’aimais me projeter dans toutes les directions, jouer à l’opposé du classique et des règles. J’appréciais de chanter le monde sous ses multiples formes, sans me priver de rien. C’est pourquoi je n’étais pas effrayé par le côté éruptif et volcanique de Fernando Arrabal. J’assumais même pleinement d’être l’acteur le plus « arrabalien » de la troupe, en charge du côté scatologique et péteur de l’écrivain, tandis que Delphine proposait un contrepoint tout en délicatesse et féminité, quand bien même mon personnage la soumettait à rien de moins qu’un examen gynécologique. »

Un bâtisseur

Au fil des pages et des souvenirs familiaux plus personnels, Jean-Claude Drouot montre bien qu’il ne s’est pas cantonné à construire une compagnie théâtrale mais a aussi à restaurer de vieilles bicoques paumées dans la campagne, que ce soit en Corse comme dans la campagne de Villefranche-de-Rouergue. Avec un net penchant pour la réfection des toitures. Confidences en forme de clé de lecture du titre de ses souvenirs : « J’adorais évoluer sur le toit. J’aime être perché, avoir la tête dans le ciel. Le pirate enfant est à jamais là-haut, dans la hune de son cerisier ! »

Bref, des souvenirs qui ne manquent ni de tonus, ni d’émotions et permettent de cerner un peu mieux un artiste hanté par la volonté d’être libre. Avec, au passage, quelques maximes sur la vie d’un comédien. « Quand je dis : « Le théâtre, c’est toute ma vie », je veux dire que le théâtre m’a tenu vivant et présent à moi-même et, je le souhaite, aux autres. »

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