CHEMIN DE CROIX, de Dietrich Brüggemann – 1h50
avec Lea Van Acken, Franziska Weisz
Sortie : mercredi 29 octobre 2014
Je vote : 4 sur 5
Maria, 14 ans, vit dans une famille catholique fondamentaliste allemande. Son quotidien est régi par les préceptes religieux. Entièrement dévouée à Dieu, elle n’a qu’un rêve : devenir une sainte. Suivant l’exemple de Jésus, elle entame son propre chemin de croix. Rien ne peut l’en détourner.
Et alors ?
En écrivant le scénario avec sa sœur Anna, Dietrich Brüggemann s’est inspiré d’une expérience personnelle, sans pour autant signer une autobiographie. En effet, durant son adolescence, il a connu les milieux catholiques intégristes, son père s’étant rapproché, pendant deux ans, de a Fraternité sacerdotale Saint-Pie X. « Notre vécu nous a simplement permis d’être plus précis dans la description de cet univers particulier, d’aller plus loin que nous auraient autorisé nos recherches sur le sujet. Vous ne pouvez pas aller à la rencontre de catholiques intégristes et leur demander comme ça de raconter leur vie pour nourrir votre récit. Il faut connaître un minimum ce milieu, ses règles, ces gens… » souligne t-il. Avant d’ajouter : « En fait, l’idée d’un film qui parlerait de religion était là depuis longtemps. Il fallait juste trouver le bon moment pour le faire. Certaines décisions controversées du pape Benoît XVI, notamment quand il a levé l’excommunication des cardinaux de la Fraternité sacerdotale Saint-Pie X en 2009, la résurgence de pratiques radicales voire le poids des églises évangélistes dans certaines régions des Etats-Unis ont remis la religion au cœur des débats. »
La force du film tient dans la subtilité dont est présenté le chemin de croix de cette adolescente confrontée à une mère qui ne veut rien céder à sa rigidité morale même si la santé de sa fille doit en souffrir. Même si elle est aimante, ses convictions d’un autre temps en peuvent conduire qu’à une catastrophe. On le mesure dans la séquence forte de la confrontation avec le médecin où Franziska Weisz fait une composition étonnante de cette mère qui refuse de changer d’un iota, emmurée dans ses convictions religieuses.
Pour autant, même si le récit est à charge, Dietrich Brüggemann se
refuse à avoir signé un pamphlet contre la religion. Il dit : « En tant que cinéaste, je ne suis pas intéressé par les films à thèse. Faire un film pour ou contre quelque chose : je ne trouve pas ça très intéressant. La propagande est un genre cinématographique à part entière, mais je préfère un récit nuancé, contrasté, d’où naît la complexité. »
Ayant pris le parti des plans fixes et d’une caméra peu mobile dans des séquences qui sont autant d’étape dans le chemin de croix de Maria, Dietrich Brüggemann fait vivre le spectateur au plus près des émotions de Maria, admirablement campée par Lea Van Acken qui réussit haut la main son premier rôle au cinéma et a une justesse de jeu étonnante pour son âge. « Lea van Acken s’est avérée une comédienne extrêmement impressionnante. Je n’ai rien eu à lui dire ou presque. Elle est à la fois très innocente et très concernée, elle sait ce qu’elle doit faire et comment le faire », dit le cinéaste.
En tout cas, ce film fort montre bien les dérives d’une certaine pratique de la foi…


