LES CAUCHEMARS D’UNE ADO AMÉRICAINE

WHITE BIRD, de Gregg Araki – 1h31

Avec Shailene Woodley, Eva Greeen, Christopher Meloni

Sortie : mercredi 15 octobre 2014

Je vote : 3 sur 5

Quezako ?

Kat Connors a 17 ans quand sa mère disparaît sans laisser de trace. Alors qu’elle découvre au même moment sa sexualité, Kat semble à peine troublée par cette absence et ne paraît pas en vouloir à son père, un homme effacé. Mais peu à peu, ses nuits peuplées de rêves vont l’affecter profondément et l’amener à s’interroger sur les raisons véritables de la disparition de sa mère…

WBIAB 4 ∏ Why Not Productions - Desperate

Et alors ?

Gregg Araki aime les univers où la violence affleure sous la douceur. Il le prouve, cette fois encore, en adaptant le roman Un Oiseau blanc dans le blizzard,  de Laura Kasischke, dont le titre lui avait été proposé par un ami producteur. Cette fois, c’est une jeune femme qui est au centre du récit, Kat Connors incarnée par une actrice qui est en train de marquer de son empreinte l’univers des jeunes stars d’Hollywood : Shailene Woodley. Elle fut révélée par le succès planétaire de la saga « Divergente » . « Laura Kasischke a une façon impressionniste d’appréhender le monde. C’est
très cinématographique. Le côté féministe du roman est aussi très important. La perspective féministe de l’oeuvre de Laura a été prépondérante pour moi car la théorie féministe au cinéma a beaucoup influencé mon travail. Il s’agit du parcours d’une jeune fille qui apprend à vivre sa sexualité, qui affronte un drame intime. Sa mère disparait du jour au lendemain. Malgré tout, le roman n’est pas construit comme un thriller classique mais davantage comme une introspection. Celle d’une famille américaine ébranlée dans ses certitudes. Le personnage de la mère, elle, renvoie une image stéréotypée de la femme au foyer américaine, une femme dont le rôle et la place ont été déterminés non pas par elle mais par le reste de la société. Elle veille à ce que tout soit en ordre dans sa maison, qui devient peu à peu une prison. Cette dimension tragique m’a à la fois bouleversé et fasciné » souligne Araki.

WBIAB 1 ∏ Why Not Productions - Desperate

Le cinéaste décrit avec une grande vérité l’univers des familles américaines de la fin des eighties, avec, comme bande sonore de l’époque, les musiques de Depeche Mode,  New Order, Cocteau Twins… On y voit le mode de vie bien conventionnel de ce clan aux apparences lisses dans laquelle la mère – Eva Green est étonnante dans le rôle – tente de sauver les apparences même si l’on sent vite les tensions qui fissurent le couple. En contrepoint de cette vie « tranquille » qui se dérègle doucement mais sûrement à la disparition sans explication de la mère, il y a tout l’univers onirique de Kate, des moments visuels forts dans le film. Propos d’Araki : « Ses rêves sont des cauchemars. Elle voit sa mère ensevelie sous la neige. Ils nous donnent un aperçu de la relation émotionnelle qui les lie et traduisent les troubles auxquels la jeune fille est en prise au plus profond d’elle-même. »

Si la première partie du film tient toutes ses promesses, si la description de ce petit monde bourgeois sonne juste, avec cette tranquillité et ce confort apparents, l’atmosphère de tension finale se grippe un peu. Dans ses références hitchcockiennes – même si, chez celui-ci, les femmes ne sont pas vraiment au cœur du récit – dans une atmosphère à la Douglas Sirk, le film ne parvient pas à vraiment nous surprendre et trop d’indices laissent entrevoir le dénouement final. Reste néanmoins cette description réaliste de la face sombre du rêve américain et d’une vie parfaite en façade, à la manière d’un Sam Mendes dans « American Beauty ».

Laisser un commentaire