UNE BELLE COMPOSITION D’EMILIE DEQUENNE

Capture d’écran 2014-02-12 à 11.57.25PAS SON GENRE, de Lucas Belvaux – 1h51

Avec Emilie Dequenne, Loïc Corbery, Sandra Nkaké, Anne Coesens

Sortie : mercredi 30 avril 2014

Je vote : 3  sur 5

Quezako ?

Jeune professeur de philosophie parisien, Clément est affecté à Arras pour un an. Loin de Paris, il ne sait pas occuper son temps libre. Un jour, il rencontre Jennifer, une jeune coiffeuse, qui devient sa maîtresse. Si la vie de Clément est réglé par Kant, celle de Jennifer est rythmée par la lecture de romans populaires, de magazine « people » et de soirées karaoké avec ses copines. Leur amour suffira-t-il à renverses les barrières  sociales ?

Capture d’écran 2014-02-12 à 11.56.43Pourquoi aimer ce film ?

On avait quitté Lucas Belvaux avec  38 Témoins, belles variations sur la lâcheté d’une communauté face à un drame.  En adaptant roman éponyme de l’écrivain français Philippe Vilain publié en 2011, il change d’un registre familier pour raconter une histoire d’amour impossible entre un prof, parisien jusqu’au bout de la tenue, et une simple coiffeuse d’Arras, ville qui sert de cadre au scénario.

De par ses origines belges, le réalisateur n’a pas eu beaucoup à se forcer pour s’immerger dans la culture de cette région. Il dit : « Je n’ai pas eu à tricher, c’était dans le livre ! Le deux grandes places d’Arras m’apparaissent comme des décors de théâtre, des toiles peintes. D’ailleurs ce sont presque des décors puisque toutes les Capture d’écran 2014-02-12 à 11.57.47façades ont été entièrement reconstruites après la guerre de 1914. C’est vrai qu’en tant que belge, je me sens chez moi. Les carnavals, les fanfares, la bière, les frites, la convivialité, ce sont des codes culturels que je connais. Clément, lui, n’est pas du coin, il considère cette ville comme un pensum, loin du monde, de son monde, bien qu’il ne se situe qu’à une heure trente de Paris. Alors, ce folklore où l’on se déguise, ou l’on fait ce qu’on veut, où l’on se lâche, on boit beaucoup, on mange beaucoup, on parle fort, on rit fort, on danse, on chante dans la rue, le laisse indifférent. Il est là en spectateur. « 

Avec une grande justesse de jeu, Loïc Cormery campe ce prof spectateur d’une vie avec laquelle il n’a aucun atome crochu. Elevé dans un cocon parisien d’une certaine bourgeoisie, il a du mal à laisser parler ses sentiments, à s’engager plus avant avec cette jeune fille, au départ farouche, et qui lui offre un amour vrai, total, sincère. Une des scènes les plus justes du film est la scène où Jennifer tente de l’obliger à la regarder quand ils font l’amour. En vain. Et dans la séquence du karaoké, on mesure aux mimiques de Clément, combien il se sent étranger à cet univers de plaisirs simples et de complicités d’un soir.

Capture d’écran 2014-02-12 à 11.57.04Face à lui, Emilie Dequenne fait une composition solide en jouant cette jeune coiffeuse, confrontée à une autre culture, à une autre classe et qui fait bien des efforts pour se montrer « digne » de Clément, en essayant même de comprendre Kant ! L’air de ne pas y toucher, Lucas Belvaux revisite à sa manière la lutte des classes en décrivant par petites touches le fossé culturel qui sépare les protagonistes. De scène en scène jusqu’au final où elle fait montre d’un vrai courage face aux couardises de Clément, elle est resplendissante. Commentaires de l’actrice : « Jennifer est une incarnation de la clarté. C’est la première fois qu’on me proposait un tel rôle, un rôle dont je rêvais : celui d’une fille qui n’est faite que de zones de lumière. En dépit de ses petites zones d’ombre, comme tout le monde, elle est entièrement dans la joie de vivre. C’est une fille optimiste, une fille qui va de l’avant, une fille moderne, indépendante. »

Sa composition ne peut que forcer le respect. Face à un tel handicapé des sentiments, elle incarne avec beaucoup d’émotion cette jeune femme directe et qui sait prendre son destin en main, quitte à faire des choix de vie radicaux.

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